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28 mai 2012

Mots (dés)appris (10) - Pied

Longtemps, j'ai cru qu'un vers se composait de pieds.

Or L'Autre Jour, à moins que ce fût l'an dernier,

Entre mille autres choses, les ondes m'apprenaient

Qu'on ne trouve point de pieds dans un vers français,

Mais des syllabes, ce qui me laissa oreilles bées.

« C'est un truc de vieux prof », en substance, qu'elle disait

La radio, à propos de ce qu'on m'inculquait

Si je me souviens bien, à l'école, en effet.

Chez les Grecs, les Latins, le pied, volontiers

Allait se faire voir et même versifier

Mais dans l'alexandrin, faudrait pas y compter.

Sur le pied, la syllabe prend le pas − prend son pied ?

L'Autre Jour décline toute responsabilité quant aux vers de mirliton pondus ci-dessus. C'était le quart d'heure du Poète-Poète, qui ferait bien d'aller versifier ailleurs, maintenant qu'on lui a laissé sa fenêtre d'expression.

Cela dit, toute information complémentaire à son verbiage à propos des pieds et des syllabes piqués aux vers sera la bienvenue, y compris sous forme de rimailleries.

Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? (7) À méditer (citation)

D'un auteur déjà cité dans cet autre billet, Pablo de Santis :

« El trabajo del traductor está hecho de vacilaciones, igual que el trabajo del escritor. El escritor también traduce y duda y quiere encontrar el término preciso que corresponde a la idea; también sabe, como el traductor, que es su propia lengua la que se convierte en inmanejable jerga extranjera. El escritor se traduce a sí mismo como si fuera otro, el traductor escribe al otro como si fuera él mismo. »

Pablo de Santis
La traducción
Ediciones Destino
Barcelone, 1999
Page 168 (avec les guillemets)

 

Le travail du traducteur est fait d’hésitations, tout comme celui de l’écrivain. L’écrivain lui aussi traduit et doute, et cherche à trouver le terme exact qui correspond à son idée ; et il sait aussi, tout comme le traducteur, que c’est sa propre langue qui se transforme en jargon étranger qu’il ne maîtrise pas. L’écrivain se traduit lui-même, comme s’il s’agissait d’un autre, le traducteur écrit l’autre, comme s’il s’agissait de lui-même.

 La Traduction
Traduit de l’espagnol (Argentine) par René Solis
Métailié, 2000
Page 126 (sans guillemets et en italiques)

27 mai 2012

Le traducteur traduit (5) - « Commanditaire »

Une frange de la profession emploie le mot « commanditaire » pour désigner la personne que les autres traducteurs appellent « donneur d’ordre » ou – mieux, à mon goût ! – « donneur d’ouvrage » (ou encore « client », surtout chez ceux qui exercent en libéral plutôt que sous le statut d’auteur).

Intrigant, non ? Je parie que ce commanditaire vous rend aussi perplexes que moi, sauf si vous faites partie de la frange en question.

Consultons le dictionnaire (j’ajouterai l'ami Robert quand je l’aurai de nouveau sous la main – pour le moment, il est en villégiature). Le Littré dit : « Bailleur de fonds dans une société en commandite. » Rien à voir avec notre homme/notre femme, donc. Le Larousse donne une définition semblable, en précisant qu’il s’agit de vocabulaire juridique : « Associé d’une société en commandite qui apporte des fonds ». Il indique aussi cet autre sens : « Personne qui commandite. » Hop, direction l’entrée « Commanditer » : « Organiser, financer un crime, un délit. »

 

Aaaaaaah ! Je savais bien que ça vous ferait tiquer et que le mot « commanditaire » vous évoquerait d’emblée, à vous aussi, la rubrique « Faits divers » des journaux ou certains films noirs, pourtant rarement consacrés à cette activité mafieuse aussi souterraine que nuisible qu’est la traduction.

 

Un troisième et intéressant sens de « commanditaire » figure dans le dico : « Recommandation officielle pour “sponsor”. » Et, à l'entrée « commanditer » : « Recommandation officielle pour “sponsoriser”. » Dans ce cas, mais seulement dans celui-là, je veux bien me faire commanditer, moi. Parce que, c’est bien connu, le crime la traduction ne paie pas. 

Les collègues ou autres connaisseurs de passage ici voudront peut-être nous expliquer comment « commanditaire » a pu prendre le sens de « généreuse entreprise donnant gentiment du boulot aux travailleurs indépendants ». Je n’ai moi-même pas trouvé cette acception dans les dictionnaires juridiques que j'ai consultés, ni dans la base terminologique IATE de l'Union européenne, ni dans mes contrats avec mes... euh... copains qui me font vivre. Juste ceci, dans une ébauche d'article de Wiki, faisant un peu l'amalgame entre les trois sens indiqués ci-dessus : « Entité demandant une prestation à une autre entité, moyennant rémunération. »

Conseils à un jeune traducteur inexpérimenté (1) - Ne pas coller son chewing-gum sur son ordi

Ô toi, jeune traducteur inexpérimenté, sache que dorénavant, les vieux briscards de la traduction − enfin, ceux qui ont débuté depuis au moins 3 mois et peuvent donc te livrer le fruit de leur expérience viendront ici te faire part de leurs astuces et autres petits secrets pour travailler dans les meilleures conditions. J'ouvre cette rubrique pour toi, pour t'éviter quelques déboires. Je compte sur nos collègues chevronnés pour compléter cette mine de conseils car il est possible que mon inspiration et ma mémoire se limitent au contenu du présent billet.

Premier conseil :

Quand, cher jeune traducteur inexpérimenté, tu as fini de mâchouiller ton chewing-gum et que tu as la flemme de tendre le bras jusqu'au-dessus de la poubelle, tu le déposes avec soin sur son papier d'origine dans l'intention de le jeter plus tard, n'est-ce pas ? Ne mets pas le papier contenant ce chewing-gum usagé sur le bord de ton portable. Si tu as pour habitude, une fois ton labeur achevé, de fermer ton ordi, tu risques d'être bien embêté quand tu le rouvriras.

Précieux avis, non ? Je parie qu'à l'école de traduction, on ne t'a pas transmis ce savoir pourtant fondamental.

Fais bien attention, aussi, à ne pas mettre ta main sur la porte, dans le métro. Tu risquerais de te faire pincer très fort.

 

Amis collègues expérimentés, à vous ! Je suis sûre que votre baluchon d'expérience déborde de recommandations tout aussi profitables, dont vous eussiez bien aimé que vos aînés vous fissent bénéficier, lorsque vous débutâtes. (← Je leur parle dans leur dialecte, pour les amadouer.)

Nos expressions préférées

Ami Lecteur, quelle est ton expression préférée, dans la langue de ton choix ?
Tu peux nous l'indiquer en commentaire, avec sa traduction en français, pour qu'on en profite !


Moi, j'aime particulièrement celle-ci, en espagnol :

No cabíamos en casa y abuela parió.


Ce qui veut dire :

« Déjà qu'on ne tenait pas dans la maison, et voilà que Mémé a accouché. »

Bref, un équivalent de notre « Manquait plus que ça ! », qui se dit aussi « ¡Lo que faltaba! » .

14 mai 2012

Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? (7) Un couiz !!

Un couiz sur le site de l'ATAA, avec un topo de présentation
sur son blog !

Allez-y, jouez, c'est instructif !

Je vous aide : une piste vers la réponse à une des questions se trouve sur L'Autre Jour.

Vous aurez accès aux soluces après avoir cliqué sur Submit. (<- Ça, c'est pour ceux qui, comme moi, risqueraient de les réclamer à l'ATAA au lieu de lire l'intro comme il faut - Ici : smiley contrit.)

 

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À propos d'une des questions du couiz :

Selon moi, quelqu'un qui traduit un texte, c'est un traducteur. Il n'adapte pas plus en doublage ou en sous-titrage qu'en quelque autre domaine de la traduction
, y compris en technique – et même plutôt moins, à mon avis.

Car traduire, c'est adapter, par définition.
Le domaine où il me semble qu'on adapte le moins, c'est la traduction littéraire, puisqu'on essaie de restituer autant que possible non seulement le sens et le niveau de langue, mais aussi la musique (le rythme, les sonorités...) du texte d'origine.

Ça tombe bien, je voulais justement écrire un billet au sujet de cette histoire d'« adaptateur », qui me paraît relever avant tout d'un certain snobisme. Les collègues sont conviés à confirmer - ou pas - sous forme de commentaires !

 

Pour moi, un adaptateur (dit « SM », en l'occurrence), c'est une personne qui adapte une oeuvre ou un programme audiovisuel du français au français (par exemple), de manière à la sous-titrer pour les sourds et malentendants. Souvent, il s'agit à l'origine d'un traducteur, qui est venu par la suite à cette autre activité.

Le seul autre adaptateur que je connaisse, c'est une sorte de raccord. Un genre de traducteur pour qu'une prise électrique britannique et un rasoir français se comprennent, par exemple :)

10 mai 2012

Marie, mon ciel ! (11)

Après un mois de grisaille, Paris a retrouvé son ciel !

2012-05-10 Coucher soleil DSCN5547_580 (Small).JPG

Pas trop tôt.

08 mai 2012

Pastore tacle Corbu

L’autre jour, je me livrais à l’une de mes activités favorites : vadrouiller. Prétexte : trouver les maisons construites dans telle ville proche de Paris par les grands maîtres de l’Art déco.

J’en avais déjà admiré plusieurs quand je m’apprêtais à entrer dans une rue où je savais en voir une de Le Corbusier. Dialogue : 

- Aimable CRS (il avait un collègue avec lui, moins loquace mais aimable aussi) :


Vous résidez dans la rue, Madame ?

 
- Moi (fondue de servilité devant l’autorité et ne manquant pas une occasion chauvine de revendiquer ma nationalité titi, d’où cette précision totalement superflue) :

 
Non, je viens de Paris.

 
- Aimable CRS (me voyant armée de 3 plans et du Routard de la Banlieue parisienne – et encore, je n’avais pas ma boussole sur moi, juste mon carnet de vaccinations pour quand je franchis le Périf) :


Vous êtes perdue ?


- Moi (me demandant si mes antennes d'extraterrestre étaient visibles) :


Non, je me promène.

 
- Aimable CRS :


C’est que la rue est barrée, il y a un match. C’est pour votre sécurité.

 
- Moi :

 
Mais, c’est pas dangereux, ils [= les supporters du Pehèssegé] sont circonscrits dans le stade, pour le moment, et le match vient de commencer.

 
- Aimable CRS :


Si, si, on vous assure, c’est très dangereux. On est obligés de ne laisser passer que les riverains.

 
- Moi (cogitant pour ruser, mais sachant d’avance que tous les autres accès à la rue seraient barrés aussi et que seuls Nungesser et Coli pouvaient y entrer, et encore) :

 
Tant pis. Je reviendrai. L’ennui, c’est qu’il y a des matches tout le temps. La prochaine fois, je tape l’incruste avec des riverains !

 

Cela dit, le parc des Princes est une œuvre architecturale intéressante aussi, quoique pas Art déco, si on va par là (enfin, si on peut). Et puis, je les ai vus un peu plus tard dans le quartier, les supporters. Ils étaient tout pacifiques et souriants. Faut dire, ils venaient de gagner 6 à 1 contre Sochaux.

J’ai quand même vu de belles maisons (sans parler des glycines, géantes et magnifiques dans le secteur) :
2012-04-22 Boulogne Pingusson DSCN5405_447 (Small).JPG
Pingusson

2012-04-22 Pingusson DSCN5406_448 (Small).JPG
Pingusson

2012-04-22 Mallet-Stevens DSCN5407_444 (Small).JPG
Mallet-Stevens

07 mai 2012

Je traduis, tu traduis... (6) Traducir el silencio

El verdadero problema para un traductor – dijó al final – no es la distancia entre los idiomas o los mundos, no es la jerga ni la indefinición ni la música; el verdadero problema es el silencio de una lengua – y no me molestaré en atacar a los imbéciles que creen que un texto es más valioso cuánto más frágil y menos traducible, a los que creen que los libros son objetos de cristal –, porque todo lo demás puede ser traducido, pero no el modo en que una obra calla; de eso – dijo –no hay traducción posible.

Pablo de Santis
La traducción
Ediciones Destino
Barcelone, 1999
Pages 100-101

Je me suis amusée à traduire cet extrait :

Le vrai problème pour un traducteur, dit-il enfin, n’est pas la distance entre les langues ou les mondes. Ce n’est ni l’argot, ni l’indéfini, ni la musique. Le vrai problème, c’est le silence d’une langue – et je ne perdrai pas mon temps à m’en prendre aux imbéciles selon qui un texte a d’autant plus de valeur qu’il est plus fragile et moins traduisible, ceux qui croient que les livres sont des objets de cristal –, car tout peut se traduire, sauf la façon dont une œuvre se tait. De cela, dit-il, il n’y a pas de traduction possible.

Traduction par René Solis :

Le véritable problème pour un traducteur, dit-il finalement, n’est pas la distance entre les langues ou les mondes, ce n’est pas le charabia, le flou ou la musique ; le véritable problème, c’est le silence d’une langue – et je ne perdrai pas mon temps à attaquer les imbéciles qui croient que la valeur d’un texte se mesure à sa fragilité ou à sa difficulté à traduire, ou ceux qui pensent que les livres sont des objets de cristal –, car tout peut être traduit, excepté la façon dont une œuvre se tait ; et pour cela, il n’existe aucune traduction possible.

Pablo de Santis
La Traduction
Traduit de l’espagnol (Argentine) par René Solis
Métailié, 2000
Page 72

2012-05-08 De Santis Métailié couv-512-4.jpg

À méditer... en silence.

Mais lisez aussi le reste, pour le suspens, en plus de la réflexion sur la traduction !

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Il existe un bon nombre de livres où apparaissent des traducteurs, de manière plus ou moins fugace. On en trouvera certains sur le site de l’ATLF. Et les heureux Anciens de l’Esit ont régulièrement droit, dans leur Bulletin trimestriel, à une chronique littéraire tenue par notre consœur Sylvie Escat, sur des ouvrages dans lesquels interviennent traducteurs ou interprètes.

Celui de Pablo de Santis est l'un de mes préférés.

Mot appris (9) - En vrac

Ces temps-ci, j’ai appris plusieurs mots, en vrac :

S c i e n c e s p i s t e

Un élève de Sciences-Po. Qui l’eût cru ?

É p a v i s t e
Quelqu’un dont le métier consiste à récupérer des épaves.
Nan, bande d'insolents, je n’ai pas eu affaire à lui.
J’ai juste vu son affichette.

Et n'en rajoutez pas en me traitant d'irrécupérable ;(

S é c a b i l i t é
Pour un comprimé, je voyais vaguement ce que ça pouvait vouloir dire.

Mais si ce mot est à la mode à la radio, c’est à propos des facteurs. Après vérification pour comprendre exactement de quoi il retourne, voilà ce que j’ai appris, dans une question posée par un sénateur au ministre de tutelle :

« Pour pallier les suppressions d'emplois à La Poste, pour la distribution du courrier, la sécabilité semble consister à découper les tournées de façon à en répartir la charge de travail sur les facteurs restants en plus de leur tournée attitrée. »

Ce truc suspect déplairait sûrement à mes copines et marotte les espaces insécables.
Et je parie que c'est lui qui met la pagaille dans la distribution du courrier dans moun païs.

Et maintenant, le pompon…

D é s a m i f i e r
Vous devez connaître, vous, fréquenteurs de faces de boucs.
Moi, jusqu’à une formation récente sur la promotion de l’activité d’auteur sur Internet, j’ignorais qu’en certaines contrées virtuelles, il était de mise de désamifier les gens. Moche, n'est-ce pas ? Pouah + Beurk.