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01 mars 2013

Mots appris (23) - Papelardie

« Sur vos factures en anglais, vous la libellez comment, vous, la mention obligatoire sur les intérêts de retard égaux à trois fois le taux d'intérêt légal ? »

« Tu aurais dû faire signer un accusé de réception de commande
au donneur d'ouvrage. »

« C'est pas l'tout, faut que je me dépêche de remplir ma CA12, si je ne veux pas exploser mon délai pour remplir ma 2035 et ma 2042. »

« Ah mais vous, vous n'êtes pas affilié, vous êtes juste assujetti. »

« D'après vous, si j'émets une note de droits d'auteur vers un pays de l'UE, faut que je remplisse une DES, pour la TVA intracommunautaire ? »

« Mais puisque je vous dis et je vous répète pour la nième fois bon sang de bonsoir que c'est tout marqué sur la notice 2041 GJ d'impots.gouv !!!  »

 

Cher Lecteur n'appartenant pas à la confrérie des traducteurs, tu dois bien te douter que mes collègues et moi ne passons pas notre vie à traduire d'amour et d'eau fraîche. Comme tous les résidents sur le sol français et, plus particulièrement en tant que travailleurs indépendants, nous avons aussi quelques obligations et tâches administratives, plus ou moins prenantes, selon notre statut et notre degré d'incurie mode de fonctionnement personnel. Trop souvent pour le goût de beaucoup d'entre nous, nous devons compléter, émettre, déclarer, renseigner, cocher la case ad hoc et nous faire tamponner.

Après des semaines de quasi-silence de ce blog *, tu t'attends à une diatribe sur la bureaucratie de notre beau pays. Et tu te dis que l'autrice du même blog merdaille une fois de plus côté suffixes. 

Détrompe-toi. Point n'est question à partir d'ici de paperasserie, mais bien de papelardie, mot appris de frais par l'épongignare de service, une fois toutes ses déclarations sociales et fiscales dûment remplies.

La papelardie, c'est le faux-semblant, la fausse dévotion, l'hypocrisie religieuse. Elle s'accompagne logiquement du verbe papelarder.

Voilà la photo de la dame, car c'en est une :

2013-03-01 Papelardie (Small).jpg

 

 

 

 

 

 

Là, c'est dans un manuscrit conservé à la British Library.
© BL

 

 

DSCN6215_1241 (Small).JPG

 

 

 

 

 


Et là, c'est à la bibliothèque de l'Arsenal (Paris), lors d'une expo consacrée au Roman de la rose  *.

 

 

DSCN6216_1233 (Small).JPG

Car dans le Roman de la rose (par Guillaume de Lorris et Jean de Meun), dont les deux manuscrits ci-dessus figurent parmi les multiples exemplaires, Papelardie est une allégorie et l'un des personnages auxquels le héros, L'Amant, a affaire au cours de sa quête pour trouver le bouton de rose dont il est amoureux.

Rien à voir avec le quotidien corvéux et gratte-papier de l'humble traductrice/teur, hein ?

 

L'amie Papelardie est du genre coriace et universel. Vous aurez la joie de la retrouver telle qu'en elle-même dans un chouette film, où elle tente de faire plier sous sa férule une petite fille qui voudrait juste avoir le droit de faire du vélo : 

Wadjda
Réalisé par Haifaa Al Mansour
(Arabie saoudite)

Pour autant que je peux en juger ne parlant pas l'arabe, les sous-titres signés Hassina Baba-Ali (LVT) sont à la hauteur de l'œuvre.

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* Suis bien contente de vous retrouver, soit dit en passant.

* Ne cherchez pas, vous vous doutez bien que l'expo est déjà finie.

11 janvier 2013

Mots appris (22) - Idiolecte

Depuis quelque temps, je vois des idiolectes partout.

Ça a commencé par quelques lignes, à propos des provincialismes et autres aspects originaux du langage de Shakespeare, comme par exemple son rare emploi du mot also :

« De telles particularités constituent ce qu’il est convenu d’appeler l’idiolecte de quelqu’un, et celui de Shakespeare ne ressemble évidemment à aucun autre. »

Vous ne serez pas étonnés d’apprendre que le chapitre concernait ce « désir très ardent » qui existe chez beaucoup de gens « de croire que les pièces de William Shakespeare ont été écrites par quelqu’un d’autre que William Shakespeare ».

C’était dans ce livre qui, malgré ou à cause de son sous-titre, vous en apprendra beaucoup sur le Barde et sur son époque :

Shakespeare – Antibiographie
Bill Bryson
Traduit de l’anglais par Hélène Hinfray
(Laquelle m’a confirmé que dans la version originale, l’auteur avait bien utilisé le mot idiolect. J’ai préféré poser la question. On ne sait jamais. Et une question idiote à propos d'un idiolecte – d'autant plus que ce mot vient de l'anglais, ce que j'allais apprendre plus tard – doit être relativement tolérable.)
Petite Bibliothèque Payot, 2012, p. 214

 

Puis, je suis tombée sur deux nouveaux idiolectes, là :

« Oui, mais encore ? Comment en est-il venu à créer une vraie langue ? Et s’il ne la parle avec personne, n’est-ce pas seulement un idiolecte ?

“Les idiolectes, je n’y crois pas. Chacun (…) parle un dialecte de sa propre langue. Dès que j’ai commencé à me servir du wardwesân, l’idiome s’est enrichi, modifié. Et l’enjeu est devenu le développement d’un véritable objet littéraire : impossible de créer une langue sans créer une littérature dans cette langue.” »

Cette fois, c’était dans :

Le wardwesân sans peine
Article d’Emmanuèle Sandron, dans lequel celle-ci s’entretient autour d'un sandwich arlésien avec Frédéric Werst, créateur de cette langue
Dans Translittérature, la revue de l’ATLF, n° 42, hiver 2012, p. 88

 

Enfin, je succombai sous une avalanche d’idiolectes, dont je ne vous livre que le début :

« Idiolecte : aphorisme et jeux de mots

Lors du transfert, s’attacher à garder la singularité du texte, c’est prendre en compte non seulement le sociolecte (porteur de valeurs socioculturelles) mais aussi l’idiolecte (en cas de présence, bien sûr). En principe, les linguistes, et tout particulièrement les sociolinguistes, affirment qu’il existe toujours des zones de contact entre dialecte, sociolecte et idiolecte. Si le sociolecte est porteur de valeur collectives, l’idiolecte – procédé de codification de premier ordre – est porteur d’une vision individuelle. Chaque idiolecte possède ses formes préférées, sa phraséologie spécifique et même ses propres mots. »

C’était dans :
Traduire la nouvelle génération d’écrivains égyptiens : réussir un puzzle minimaliste
Article de Sahar Samir Youssef
Dans Traduire, la revue de la SFT, n° 226 « Face au miroir », 1er semestre 2012, p. 120

 

Ils sont partout, je vous dis ! C'est à peine si j'ose encore ouvrir un bouquin, moi. Je me sens cernée...

 

« Idiolecte :

Utilisation personnelle d'une langue par un sujet parlant.
Tous les idiolectes sont différents.
»

Petit Robert

 

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Si toi aussi, Lecteur, tu possèdes ton idiolecte,
vas-y, exprime ta singularité linguistique
dans les commentaires.

11 décembre 2012

Mots appris (avec consternation) (21) - Armillaire

Sous-titre : Marronnier.

 

D'armillaire, je ne connaissais que la sphère, pour en avoir vu de nombreux exemplaires au Portugal.

J'ignorais l'existence du substantif jusqu'à ce que je découvre un périmètre de sécurité, installé autour d'arbres majestueux et depuis toujours familiers. Selon un panneau d’affichage, l'un d'eux était tombé, victime d'un champignon de ce nom.

Attristés, des habitants du quartier contemplaient la souche. Les spécialistes doivent maintenant examiner les arbres voisins pour vérifier qu'ils n'ont pas été contaminés eux aussi.

2009-04-03 Buttes coucher soleil (Small).JPG

Évitons que cette affligeante nouvelle parvienne aux oreilles d'Idéfix.

 

armillaire,buttes-chaumont,arbre tombé,arbre malade,champignon

 

27 novembre 2012

Mots appris (20) - Dictionnairique

« Vérifions dans le dictionnaire. »

« Ce mot n'est pas français, il n'est pas dans le dictionnaire. »

Ces deux phrases trahissent une double méprise.

Ceux qui se repaissent de pages de dictionnaires voudront sans doute en apprendre plus car, même sans le savoir, ils s'intéressent probablement à la dictionnairique.

C'est le sujet du Musée virtuel des dictionnaires, un de ces sites sur lesquels il vaut mieux ne pas tomber si on ne dispose que de 24 heures par jour, dont une bonne partie consacrée à manger et à dormir.

En effet, ils vous happent dès que vous mettez le nez dedans ;( Celui-là est l'œuvre du Métadif, organisme affilié au CNRS et à l'Université de Cergy-Pontoise. On ne les remercie pas !

Comment ai-je malencontreusement mis le bout du museau dans cet engrenage ? En cherchant innocemment la réponse à la question posée par une consœur, Gisèle J., sur le forum de l'ATLF. Prise d'un doute, elle se demandait s'il convenait d'écrire en italiques le titre d'un dictionnaire, comme on le fait pour les autres livres. On ne la remercie pas non plus !

 

20 novembre 2012

Mots appris (19) - Becquets et paperolles

De même que les vicomtes, les fous d’informatique ou les coureurs de fond (etc.) se racontent des histoires de vicomtes, de fous d’informatique ou de coureurs de fond, les traducteurs se racontent des histoires de traducteurs, en papotant sur des forums.

Souvent, le papotage consiste à aider les collègues quand ils sèchent sur un terme. La plupart d’entre eux ne posent une question qu’après avoir épluché, si je puis dire et dans un ordre variable, la Toile, les bouquins qu’ils ont sous la main, leur mémoire, les connaissances de leur entourage, la bibliothèque municipale ou un centre de ressources documentaires plus spécialisé. Question de conscience professionnelle et d’amour-propre. [Idem pour les jeux de mots : vous partageriez, vous, être sainement égoïste, les délices procurées par la recherche de leur équivalent dans la langue cible ? Pas plus que l’écureuil de LÂge de glace *** ne cèderait son gland et seulement dans un cas désespéré ? Nous sommes bien d’accord.]

L’autre jour, c’est l'ami Frédéric qui, après avoir épuisé ses pourtant vastes ressources, appelait les collègues à la rescousse :

« J’ai le souvenir d’avoir croisé un terme désignant les petits bouts de papier que l’on insère dans un jeu d’épreuves afin d’y signaler les corrections proposées. Si ma mémoire ne m’égare pas, le mot désigne également une scène ajoutée à une pièce de théâtre lors des répétitions. J’ai déjà perdu un temps déraisonnable à cajoler et menacer ma cervelle qui persiste à me narguer. »

Ça n’a pas loupé : dans les 7 minutes qui ont suivi, Frédéric recevait deux réponses, d’Évelyne et d’Éric. Je laisse un peu d’espace avant de vous livrer la soluce, pour que si ça vous amuse, vous puissiez vous aussi vous creuser le ciboulot en quête de souvenirs enfouis.

 

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Eh bien, ces petits papiers s’appellent des « becquets » ou « béquets ». Merci les amis, merci la liste de diffusion de l’ATLF, vous m’avez appris un mot ce jour-là.

Frédéric nous communique ce qu'en dit le Big Bob, confirmant au passage le sens théâtral qu'il attribuait au becquet :

becquet [bDkD] n. m.

ÉTYM. 1587; bechez, v. 1170; de bec.

v

1 Vx. Petit bec.
2 Mod. (Objets matériels). a (xiiie). Pêche. Brochet; saumon à museau allongé.
b Cuis. Chair de porc attachée à la mâchoire inférieure et consommée ordinairement fumée.
c Techn. Morceau de cuir pointu destiné à renforcer la semelle usée d'une chaussure.Menuis. Morceau de bois rajusté à une cassure.Autom. Pièce de carrosserie (élément stabilisateur aérodynamique) ajoutée à l'avant et à l'arrière d'une automobile pour améliorer l'écoulement de l'air le long du véhicule.
3 (1808, béchet). Imprim. | Becquet ou béquet (morceau de papier portant un texte) : languette, petit morceau de papier écrit qu'on ajoute à une épreuve pour signaler une correction, un ajout.
¨ Typogr. Morceau de papier fin collé sous la feuille de mise en train pour mieux faire ressortir, lors de l'impression, les caractères qui apparaissent faibles sur l'épreuve.
¨ (Av. 1850). Argot de théâtre. Fragment de scène ajouté par l'auteur au cours des répétitions.
0 Tous ont mal joué, préoccupés de leurs toilettes et des derniers béquets, voulant jouer comme je veux et contre Antoine, furieux, qui ne sait plus un mot de son rôle.
J. Renard, Journal, 1er mai 1903.

Les becquets des copains m’ont fait penser à un autre mot, un joli mot également appris de frais et qui me semble en être synonyme ou presque (?) : les « paperolles », qu’utilisait Marcel Proust pour apporter des ajouts à ses écrits.

Et comme d’un mot, ou d’un de ses sens, on saute souvent à un autre, j’ai aussi appris récemment et par ailleurs (lors d'une farfouille dans le domaine des « loisirs créatifs », merci aux cousins québécois pour leur Abécédaire) que les paperolles étaient également d’étroites bandes de papier enroulées sur elles-mêmes et servant à réaliser des ornements et tableaux. Mais vlatipa que d'éminents spécialistes des arts populaires contestent l'adéquation de ce terme. Et profitent de votre visite pour vous en apprendre une quantité
d'autres ! Ouf, ils répertorient « égrenure » mais pas « engrenage »...

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Deux jours plus tard...

La vie de traducteur/trice étant, comme l'expriment au plus juste Les Piles intermédiaires, « une suite d'ébouriffantes coïncidences sans hasards », je suis tombée à peu près au moment où je rédigeais ce billet sur un devis de maçonnerie. Oui, je tombe assez souvent sur des devis d'entreprises du bâtiment, et ce n'est ni parce que je les traduis, ni parce que mes droits d'auteur me permettent de me faire construire des baraques un peu partout.

Dans ce devis, il était question de la réparation d'un becquet ! Encore un ! Pas le becquet en papier de Frédéric, ni celui de l'argot de théâtre, ni aucun exactement de ceux que nous cite son Grand Robert. Dans ma terminologie à moi, c'est « un machin en béton au bord du balcon de la voisine (qui part en miettes, en l'occurrence - non, pas la voisine, quoique) ». Donc, encore un nouveau sens !

Après enquête dans un glossaire d'étanchéité en ligne, ce becquet-là s'avère être un « dispositif destiné à protéger la tête du relevé d'étanchéité, empêchant l'eau de migrer vers le relevé ».

Quand Les Piles vous disent qu'on a une vie ébouriffante... C'est tout le temps comme ça. On tombe sur un terme bizarre et inconnu au possible et dans les heures qui suivent, on retombe dessus dans un contexte différent. Et souvent, celui-ci répond à la question que posait le terme dans la précédente occurrence. Dès que j'ai un stock de ces petites coïncidences termino-anecdotiques, je vous fais une compil.

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*** À propos, quelqu’un peut-il me dire pourquoi cette bestiole ressemble furieusement à un renard ? D’accord, Scrat est un écureuil préhistorique et son espèce a peut-être eu le temps d’évoluer depuis l’ère des mammouths, mais quand même, ça m’intrigue. Merci !

10 octobre 2012

Mots (ré)appris (17) - Neurone

Vous saviez, vous, qu'il existe des neurones digestifs ?

J'avoue que ne l'ai appris que récemment. Hem, tout s'explique...

 

 

 

Cf. par exemple cet article de Science et Avenir.