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18 septembre 2013

« Le traducteur est un espion...

 ...à la solde de l’écrivain. »


Joli, non ?

Qui a dit que ledit espion était voué à rester dans l'ombre ? Il est une émission de radio, toujours intéressante quels que soient son sujet et ses participants. Elle cite systématiquement le nom des traducteurs des livres qu'elle présente. Mieux encore : elle les invite souvent, pour eux-mêmes. Cette émission passe le dimanche sur France Culture, elle se télécharge pour qu'on puisse l'écouter quand on veut et rien que pour son titre :
Tire ta langue
, elle le mérite.

Dimanche dernier, son animateur Antoine Perraud avait jeté son dévolu sur Bernard Turle, traducteur et écrivain. L'émission m'a fait regretter de n'avoir pas encore lu Diplomat, Actor, Translator, Spy, dont il est co-auteur avec Daniel Gunn, pour découvrir leurs jeux par texte interposé. Ou un autre de ses ouvrages, Le Traducteur-orchestre, ne serait-ce que parce qu'il disait s'être intéressé au traducteur dans son quotidien au lieu de faire œuvre de traductologue (tant mieux, ça nous change des bla-bla fumeux et abscons).

J'en avais lu parler, pourtant, de ses livres ! Ils ne perdent rien pour attendre, la lacune sera vite comblée.

Bernard Turle écrit aussi : « C’est en traduisant que j’ai appris le français. »


Pour mon humble part, je ne cesse de l'apprendre et ce n'est pas fini.
Pas un quart d'heure sans plonger le nez dans le dictionnaire,
avec le sentiment gabinesque de savoir
tout au plus que je ne sais rien.
Ce doit être ça, le quotidien du traducteur.

22 janvier 2013

Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? (15) Tradactrice

Elle
— Chaque fois, c’est une langue étrangère. Un auteur vous propose son monde. Il faut aller dans cette terra incognita et le traduire. Voilà. C’est ça aussi, le rôle de l’acteur. C’est traduire.

Lui
— L'acteur est un traducteur ?...

Elle
— Oui.

Lui
— Belle idée.

Elle
— Tout autant qu'un passeur. Pour moi, c'est la même chose.

Lui
— Quand vous traduisez, est-ce que vous acceptez parfois de trahir un tout petit peu pour être au plus près de l’émotion ?

Elle
— Bien sûr. (...) De toute façon, le processus de travail est passionnant. C’est Maria Casares [argh, j'adore Maria Casares !] qui disait qu’elle n’aimait pas trop jouer mais qu’elle adorait répéter. Moi, je ne suis pas comme ça, j’aime de plus en plus jouer.

 

Elle, c'est l'actrice Anne Alvaro, et lui, c'est François Busnel, qui l'interview dans l'émission Le Grand Entretien, sur France Inter, le 21 janvier 2013 (vers 7').

Vers la minute 27, la traduction est de nouveau évoquée. Mots-clés pour dressage d'oreille : Shakespeare, auteur contemporain, traduit par le metteur en scène, ou traduit par André Markowicz.

 

On se régalera aussi à réentendre un extrait du film d'Agnès Jaoui, Le Goût des autres, où Anne Alvaro donne à Jean-Pierre Bacri sa première leçon d'anglais.

 

15 octobre 2012

« Ça n’est pas pour me vanter… »

... Enfin si, un peu, quand même, car votre servante a eu son quart de seconde de célébrité : on l'a citée à la TSF. Il n'est pas si fréquent qu'un traducteur – autre qu'un écrivain célèbre cumulant les deux casquettes – soit nommé sur les ondes. Pourtant, je n'ai signé la version française des oeuvres d'aucun lauréat du prix Nobel de littérature, et quand bien même... Non, j'ai juste pratiqué mon activité favorite joué.

Contexte :

- Scène I - Un présentateur télé pose une question d'une pertinence contestable à l'acteur américain Tommy Lee Jones. L'interviewé l'envoie proprement balader, en lui rétorquant : « I'm not gonna dignify this question by answering it. »

- Scène II - Dans sa chronique matutinale sur France Culture, Philippe Meyer lance un petit concours à l'intention des traducteurs : comment auraient-ils traduit la réponse de Tommy Lee Jones ? Auraient-ils trouvé aussi concis et cinglant en français ? Le verbe to dignify, en particulier, le titille.

- Scène III - Dans sa chronique toujours aussi matutinale du lendemain, Philippe Meyer cite quelques-unes des nombreuses propositions de traduction qu'il a reçues. Parmi les versions d'autres auditeurs figure mon humble suggestion  : « Cette question mérite que l'on passe à la suivante. »

Le but du jeu était-il de rendre un mot à mot ? Non, évidemment. Philippe Meyer parle anglais et pouvait très bien vérifier dignify dans le dictionnaire, pour traduire de lui-même par ceci : « Répondre à cette question serait lui faire trop d'honneur. »

Par ailleurs, je suis infichue, moi, de traduire un mot – en l’occurrence dignify – par un autre. Sans quoi, il y a beau temps qu’on m'aurait remplacée par un logiciel de traduction automatique, beaucoup moins exigeant sur le plan alimentaire et beaucoup moins teigneux. Ce que je traduis, ce sont des idées, du sens et un ton, en fonction du locuteur et du public ciblé. Et en plus, là, il s'agissait de jouer ! Pour le divertissement des auditeurs ! Pas de leur livrer une trad aseptisée. Vous pensez bien que j'allais me lâcher.

Me lâcher... Pas tant que ça. J'ai l'impression d'avoir été fidèle à Tommy (Lee Jones) moi, malgré un apparent éloignement de la phrase d’origine. Je ne suis pas assez familière avec lui pour lui demander ce qu'il aurait dit s'il avait parlé français. Mais je peux supposer qu'il aurait peut-être dit quelque chose comme ça. Rien ne me le prouve, bien entendu.

On objectera que ma proposition est fidèle si on veut, car il n'y a pas eu de question suivante, Tommy Lee Jones, most dignified, ayant quitté le plateau.

Enfin, une précision qui me paraît importante. Là, on jouait au traducteur. On se vautrait dans le luxe, car on avait tout le temps de la réflexion et, en plus, le droit de se planter. On n'était pas dans la situation réelle de l'interprète. Lui, il a beau avoir préparé son intervention et être doté de nerfs d'acier, il ne peut envisager toutes les surprises et doit trouver sur-le-champ non pas quelque chose comme ça, mais quelque chose qui colle vraiment. Et que les auditeurs parlant vaguement l'anglais ne pourront qualifier de trahison par rapport à la version originale, qu'ils entendent. Ni, du moins, rater la suite du propos parce qu’ils auront réfléchi à l’adéquation de la traduction. (Le même genre de contraintes qu'en sous-titrage.)

Nos professions respectives se valent, elles ont chacune leurs difficultés et je ne mets pas l'une sur un piédestal par rapport à l'autre, contrairement à certains traducteurs atteints de complexe d’infériorité. Mais elles sont différentes et il convenait de rendre justice et hommage aux cousins.

Ça n'était donc pas seulement pour me vanter que j’ai publié cet article, mais aussi pour saisir une occasion de mieux faire connaître nos métiers aux auditeurs sachant auditer, et qui passeraient dans le coin.

L'occasion aussi de lancer un coup de griffe très indirect à un présentateur télé, qui eut naguère le mauvais goût de faire l'apologie des fansubbers. Je sais, c'est petitement revanchard de ma part.

Merci, Monsieur Meyer, d'avoir une fois de plus mis la traduction pas trop automatique en valeur dans l'une de vos chroniques.

Et merci aux collègues Nelly A.-D.,  Marie-Christine G.-C. et Jeremy O., car sans eux, je n'aurais peut-être pas eu connaissance de la première chronique, pas forcément trouvé l'extrait de l'émission télé et sûrement pas allumé le poste aux aurores pour guetter la seconde chronique et les soluces !


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Liens vers les sources citées :

Canal+, Grand Journal :

http://www.youtube.com/watch?v=0x5FE2pM8zw

France Culture, chroniques de Philippe Meyer, 10 et 11 octobre 2012 :

http://www.franceculture.fr/emission-la-chronique-de-philippe-meyer-chronique-de-philippe-meyer-2012-10-10

http://www.franceculture.fr/emission-la-chronique-de-philippe-meyer-chronique-de-philippe-meyer-2012-10-12

01 juillet 2012

Mots appris (13) - Weltanschauung

L’autre jour, j’écoutais un ancien numéro d’une de mes émissions-chouchous, Tire ta langue, présentée sur France Culture par Antoine Perraud. Pas récent, le numéro, car il datait du 23 novembre 2004. Ce jour-là, l’émission était intitulée Comment sous-titrer les films ?.

Vers la 37e minute, on entend quelques bribes de dialogue des Ailes du désir. Une vraie musique, et pas seulement à cause de l'accompagnement instrumental. Du miel pour les oreilles, même non germanistes. L’animateur interroge alors Estelle Renard, qui fait partie de ses invités, tous traducteurs audiovisuels : 

– Les Ailes du désir nous mènent à cette espèce de langue comme conception du monde… Je crois me souvenir de mes années de lycée qu’il y a un mot allemand pour définir cela, comment dit-on ?…

Estelle répond sans hésiter : « [un truc qui, pour mes oreilles encore emmiellées mais toujours pas germanistes, ressemble vaguement à "Atchoum", mais en plus long.] »

Estelle n’est pour rien au fait que je n’aie pas compris ce mot. Elle l’a fort bien prononcé. Je dois toutefois enquêter auprès de ma Décrasseuse attitrée pour savoir de quoi il s’agit. 

Réponse de ma Décrasseuse attitrée : « C'est la Weltanschauung, un concept effectivement bien connu des germanistes et des freudo-jung-iens, entre autres. :-) » 

Moi : « … » ←Silence éloquent, vous en conviendrez, indépendamment du fait que notre échange se déroule par mél.

Une brève enquête sur Wiki me permet de combler un peu plus une lacune qui a cependant encore de beaux jours devant elle :

« Weltanschauung est un terme allemand désignant la conception du monde de chacun selon sa sensibilité particulière. Il associe "Welt" (monde) et "Anschauung" (vision, opinion, représentation). La Weltanschauung est au départ une vision du monde d'un point de vue métaphysique, notamment dans l'Allemagne romantique ou moderne. » 

Bref, si je replace ma nouvelle acquisition de vocabulaire dans le contexte du sous-titrage, j’en comprends que ça veut dire, dans mon langage à moi : « Sous-titrer, c’est pas fastoche, ça demande un gros boulot d’adaptation culturelle. » Or, souvent, comme l'indique Sylvain Gourgeon, autre participant à l'entretien, on est obligé de rester dans un entre-deux.

Quelqu’un veut-il se dévouer pour broder sur le sujet ce cette vision du monde et de ce qu'elle implique en matière de traduction ? Ici, sous forme d'article que je me ferai un plaisir de publier, ou sur un autre blog, qu’il soit personnel ou associatif ? Ce serait dommage de ne pas approfondir, non ?… La Weltanschauung est dans votre camp ! Danke Schön !

 

Les producteurs de Tire ta langue ont bien voulu exhumer cet ancien numéro pour l’ATAA (Association des traducteurs-adaptateurs audiovisuels), à l’occasion de l'enregistrement d’une nouvelle émission, diffusée, celle-ci, le 17 juin 2012. Cette fois, plusieurs traductrices membres de l'ATAA étaient invitées à s'exprimer sur L’art du sous-titrage et du doublage. Je ne peux vous donner de lien vers celle de 2004***, mais celle de 2012 est .

 

*** Quelques heures plus tard :

Si, en fait, je peux vous le donner, le lien vers l'émission de 2004, comme me le rappellent pertinemment Les Piles dans leur commentaire.

 

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Digression :

Au cours de l'émission de 2004, j'entends avec satisfaction le chroniqueur Philippe Barthelet prononcer correctement (mais après tout, ça devrait aller de soi), le mot « gageure », si souvent écorché par ailleurs à la radio, ce qui m'a récemment inspiré un coup de griffe dans un autre article publié sur ce blog.

03 juin 2012

Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? (8) Ou ils font autre chose...

C'est beau, le monde virtuel des forums, on s'y fait des amis (enfin pas forcément que des amis, mais bon). Qu'on ne rencontre parfois de visu qu'après des années de correspondance tout aussi virtuelle.

J'aime bien ces relations épistolaires modernes. On connaît ses collègues-amis bien mieux que si on était avec eux dans un bureau toute la journée et seulement sous leur meilleur jour (et – hem – vice versa, surtout). Car on ne se prend jamais de bec*** sous prétexte que l'un a piqué son agrafeuse à l'autre...


Quand ils ne traduisent pas, certains s'adonnent à de curieuses occupations. Écrire, par exemple. Et, par exemple encore, écrire de petits textes qui passent à la radio !

Alors, ça me fait plaisir de vous aiguiller vers ce poème-musique de Nathalie, diffusé sur France Musique dans l'émission de Véronique Sauger, Contes du jour et de la nuit.

 

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*** Digression :

Les dicos, contrariants et ligués contre la logique,
m'interdisent d'écrire « prise de becs » au pluriel.
Contrariants, je vous dis.

27 avril 2012

MP3 - On n'arrête pas le progrès

2012-03-19 MP3 Arts Métiers expo radio DSCN5321_354 (Small).JPG

Récepteur de radiodiffusion miniature à trois lampes
Microdion pliant MP3 - 1924

2012-03-19 MP3 Arts Métiers expo radio DSCN5323_356 (Small).JPG

Cette fois, vous ne grognerez pas que je vous informe de l'expo une fois qu'elle est finie.
C'est sur la radio, c'est à Paris, au musée des Arts et Métiers***, et ça dure jusqu'au 2 septembre 2012.

 

*** Qui vaut le détour ne serait-ce que pour l'exposé aussi drôle que magistral sur le pendule de Foucault. Et pour la mascotte d'Hispano-Suiza (qui m'inspire à elle seule plus que la bagnole tout entière, pourtant magnifique), entre mille autres trésors magiques.

2011-12-31 Hispano-Suiza DSCN5026 (Small).JPG