Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

09 juillet 2014

Mots de travers (13 bis) - Migouël chante le flamenco

L'an dernier, Migouël et son acolyte Yorgué faisaient du vélo.
Bientôt, car le Tour de France 2014 vient de débuter, nos amis commentateurs sportifs nous tiendront en haleine avec leurs nouvelles tribulations par vaux et surtout par monts pentus et épingle-à-chevelus.

Mais ces jours-ci, avant d'enfourcher son fougueux destrier métallique(*), Migouël chantait le flamenco. Nous l'avons appris grâce à notre radio nationale, qui nous annonçait un festival renommé dont elle est partenaire. Ni le directeur artistique, ni le comédien, ni l'équipe qui les entourait pour enregistrer ce communiqué de 30 secondes n'avaient eu l'idée – alors que c'est un peu leur boulot, de même qu'à leur donneur d'ouvrage, la station de radio, et qu'une partie d'entre eux a dû faire espagnol deuxième langue au lycée –, de vérifier que « Miguel » se prononce « Miguel ». Tout comme « bande de guignols » se prononce « bande de guignols » ou que « gueulante » se prononce « gueulante ». Y punto.

 

Le communiqué annonçait le plus grand festival de flamenco en France, auquel participait l'un des plus célèbres cantaores actuels, Miguel Poveda. Il est vrai que des décennies durant et avec leur plus bel accent italien, nos ondes nationales ont vibré au talent de Paco de Loutchilla. Bravo, le service public. Y olé.

 

2014-07-09 Flamenco affiche2014 (Small).jpg

 

L'autrice de ce blog avoue avoir les oreilles
d'autant plus chatouilleuses qu'elle est aficionada.
Cependant, répétons-le, elle n'attend pas des médias audiovisuels
qu'ils dominent toutes les langues de la planète
(c'est parfois beaucoup leur demander
que de commencer par maîtriser la nôtre).
Elle préférerait juste que dans le doute,
ils prononcent les noms étrangers à la française.
En particulier quand cela coïncide peu ou prou
avec la prononciation correcte.

 

(*) Ce misérable blog se complaît aux clichés les plus éculés
au lieu d'appliquer les conseils, pourtant précieux,
dispensés par M. Hédi Kaddour lors des délectables
Après-midi stylistiques de la SFT.
Mais c'est juste dans le vain espoir
de supplanter d'égaler d'imiter les éditoriaux brillamment
affligeants qui lui servent d'anti-cas d'école. 
Le lecteur naïf et bon public l'admettra volontiers
(ennemi de la mauvaise foi, passe ton chemin) :
les expressions toutes faites qui émaillent (forcément)
ces pages sont bien sûr voulues et mériteraient
d'être classées « espèce protégée »
(cf. François Cavanna, Mignonne, allons voir si la rose, Belfond, 1989).

10 mai 2014

Traduire idiot

Non, je ne lancerai pas sous ce titre une nouvelle rubrique destinée à dénoncer l'idiotie dont font souvent preuve ceux qui publient / utilisent / manipulent des traductions. 1) Cela m'obligerait, pour être honnête et exhaustive, à couvrir aussi l'incompétence de certains de ceux qui les produisent. 2) Je cède déjà de temps en temps à cette envie dans la rubrique Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? qui cible plutôt ceux qui s'improvisent traducteurs. 3) Ce serait négatif. 4.) Ce serait beaucoup trop chronophage et fatigant. 5) Mes collègues s'en chargent très bien, sur leurs propres blogs.

Là, et puisque le boulot est déjà tout fait, je n'ai qu'à vous aiguiller vers ce billet intitulé Traduire pour le tourisme de ma consœur et copine Maria Marques, qui traduit du français et de l'anglais vers le portugais du Brésil.

12 janvier 2014

On parle de nous ! De nous, vraiment ?

Un hebdomadaire vient de consacrer un dossier de 4 pages aux traducteurs ou du moins aux traducteurs littéraires. Ô joie, car les occasions sont rares de sortir de l'ombre pour la profession en général – toutes catégories réunies mais c'est encore plus vrai pour certaines.
 
L'article n'est pas exempt d'erreurs, notamment quand les informations fournies sont chiffrées (j'avoue le constater dès que la presse traite d'un sujet que je connais). Dès le premier paragraphe, on observe une belle concentration d'idées fausses.
 
À l'intention des profanes qui passeraient par ici, des apprentis traducteurs avides de savoir de quoi sera fait leur avenir ou des collègues qui voudraient à leur tour corriger ce qui suit s'ils ont une expérience différente, rectifions la principale contre-vérité relevée dans ce paragraphe.
 
Les traducteurs qui n'exercent pas en tant qu'auteurs sont pour la plupart tout aussi indépendants que ces derniers. En effet, ce sont des professionnels libéraux (= fournissant à titre personnel une prestation intellectuelle), ils travaillent à leur compte, ils sont inscrits à l'Urssaf, ils paient des charges patronales, etc. En bref, dans leur majorité, ce ne sont pas des employés, contrairement à ce que l'article donne à entendre.
 
Certes, les traducteurs salariés existent. Beaucoup travaillent au sein d'organisations internationales. D'autres sont chefs de projet dans des agences. Il doit bien y en avoir encore dans certaines grandes entreprises ou administrations qui n'auraient toujours pas songé à  externaliser leur service Traduction. Ils forment la minorité des nombreux collègues que je connais, les autres étant libéraux, auteurs ou les deux (oui, il en est qui, moi la première, mangent à deux râteliers, voire trois car les traducteurs travaillant pour l'audiovisuel sont également auteurs, pour la plupart).
 
Il serait donc temps qu'on cesse de prétendre que tout traducteur n'œuvrant pas pour l'édition est salarié, voire « simple employé », avec une nuance implicite de mépris – comme si travailler au sein d'une organisation était indigne, soit dit en passant...

Le premier paragraphe de cet article n'évoque à la va-vite cette population de sous-fifres et de gratte-papiers (qu'elle soit extrêmement qualifiée et souvent bardée de diplômes ne saurait lui valoir le moindre prestige) que pour les distinguer de l'être supérieur étudié dans la suite de l'article, celui qui mérite que la presse se penche sur lui de temps à autre, quitte à aligner quelques bourdes sur son compte : le traducteur littéraire.
 
Une fois de plus, on voudrait placer la crème « littéraire » au-dessus du vulgaire brouet dit « technique ». C'est un cloisonnement idiot (aussi idiot selon moi que d'établir des distinctions de caste entre médecins selon leur spécialité ou leur mode d'exercice, ou une échelle de valeurs entre scientifiques et artistes, par exemple), c'est dommage, cela ne reflète pas la réalité.
 
Cher Jeune Traducteur Inexpérimenté, prends-en de la graine : nous avons tous des activités, des conditions d'exercice et des compétences différentes car notre métier est par chance multiple. Au point qu'il est peut-être difficile de le faire connaître dans sa diversité. Cependant, nous diviser, oublier les enjeux qui nous sont communs n'est pas une solution. À nous donc d'éclairer la lanterne du public, quand l'occasion s'en présente. Après tout, nos représentants (associations, syndicats, qui œuvrent dans ce sens) et nous-mêmes, à titre individuel, sommes le mieux placés pour cela.

 

05 octobre 2013

Jouons z'un peu à déplorer

« La Scam déplore qu’aucune proposition concrète ne soit formulée concernant le droit d’auteur dans le secteur du jeux vidéo. »

Ah oui, il serait temps qu'elle déplore. Perso, ça doit faire une petite dizaine d'années que j'ai tenté de le déplorer auprès de la Scam (Société civile des auteurs multimédia) et que je me suis fait proprement rembarrer, me sentant sur le moment une incarnation du hors-sujet, voire l'allégorie de la question incongrue. Je constate avec plaisir que depuis lors, la Scam a revu sa position :

« Le monde du jeu vidéo est un imaginaire,
sa valeur ajoutée est bien le fruit de la création
d’une conjonction de talents. »

La suite dans le communiqué de la Scam concernant le rapport des sénateurs Gattolin et Retailleau sur le jeu vidéo et le droit d'auteur. À lire aussi, le rapport des deux sénateurs. Tenez, un petit extrait :

Le positionnement délicat du jeu vidéo à la frontière entre industrie et culture s’explique par la nature intrinsèquement duale du produit. D’ailleurs, pour les instituts de recherche, les jeux vidéo sont des « logiciels de loisirs » ou « loisirs interactifs », tandis que le grand public parle de « jeux vidéo ».
Pour Erwan Cario, auditionné par le groupe de travail, si le jeu vidéo est issu de l’imagination et du travail de ses auteurs, il est aussi le résultat d’une conception très encadrée. Le jeu vidéo serait donc un secteur créatif sous contraintes : contrainte technologique bien-sûr (puissance de calcul, possibilités graphiques du support choisi), mais également contrainte d’interface (moyens pour interagir avec l’univers créé) et contrainte économique et commerciale (nécessité d’être édité et distribué pour être
vendu).
Cette analyse est partagée par Philippe Chantepie, dans son étude précitée, qui estime que « dans sa conception même, le jeu vidéo entretient un rapport originel aux technologies et à l’interactivité ». La particularité de la création vidéo-ludique dans son lien entre le jeu et son interactivité a pour conséquence de rendre le jeu vidéo intrinsèquement différent des formes d’art connues jusqu’alors.
Cette originalité du jeu vidéo a été reconnue par la jurisprudence après plusieurs décisions contradictoires quant à la définition à donner à ce produit (logiciel, œuvre audiovisuelle, base de données, etc.). Dans son arrêt Cryo du 25 juin 2009, la Cour de cassation a considéré que le jeu vidéo « est une oeuvre complexe, qui ne saurait être réduite à sa seule dimension logicielle, quelle que soit l’importance de celle-ci » et a reconnu, à cette occasion, la dimension graphique, narrative et musicale – c’est-à-dire artistique – du produit.

On observera que, quand bien même un jeu vidéo ne consisterait qu'en une suite de 0 et de 1 (pas remarqué, pour ma part, quand je traduisais les dialogues d'Indiana Jones ou autres) et ne contiendrait pas la moindre trace d'imaginaire et de fiction, il relèverait du droit d'auteur, comme l'indique cette notice de l'Agessa relative aux auteurs d'œuvres multimédia.

Citons l'Agessa :

Se retrouvent sous cette qualification : les jeux vidéo en ligne, les pages de présentation et d’accueil de sites internet, les CD-Rom (ludo-éducatifs, jeux vidéo), les blogs (journal ou bloc-note personnel communiqué au public par le biais de l’internet) réalisés dans le cadre d’un contrat d’édition.

et

L’œuvre multimédia ne figure pas au nombre des catégories des œuvres énumérées à l’article L 112-2 du Code de la Propriété Intellectuelle mais a été reconnue par les tribunaux comme œuvre de l’esprit protégeable par le droit d’auteur.

Alors, qu'est-ce qu'on attend pour placer les éditeurs de jeux à même enseigne que les éditeurs de livres et les sociétés audiovisuelles ? Remarquez, je m'en fiche, car ça fait plusieurs années que je ne travaille plus pour eux pour cause de dégringolade des rémunérations. N'empêche, vu les chiffres d'affaires du secteur, j'aurais bien aimé palper quelques droits sur les ventes passées, moi, puisqu'il est un peu tard pour bénéficier aussi de futilités telles qu'un contrat en bonne et due forme et la mention du nom de l'auteur.

Comment ça : « Allons bon, faut-il comprendre de tout cela qu'on peut être payé pour jouer ? » Bah voui, pardi, et pour traduire des jeux, aussi.

 

La Scam n'en reste pas moins mon amie :)

12 avril 2013

Mots de travers (15) - Poulet

Cher Jeune traducteur inexpérimenté,

Si dans un texte (au hasard, supposons-le rédigé en anglais), tu rencontres des animaux à plumes, pondant des œufs et (tu vas voir combien je t'aide) logés dans un poulailler, ou vaquant alentour... Tu les traduis comment, ces animaux à plumes, etc. ??

« Je t'ai déjà supplié de ne pas me prendre pour plus sot que je ne suis », me susurres-tu avec le sens de la concision et de la diplomatie qui te caractérisent (car en fait, tu viens de me rétorquer : « Tu m'prends décidément pour un con ? », tout en pensant, tellement fort que ça en a transpiré : « Ça f'sait longtemps qu'elle avait pas confondu "jeune" et "décérébré". »).

Pardon, cher Jeune traducteur inexpérimenté mais pas au point de n'avoir jamais entendu parler de poules, ni des moyens de te documenter à leur sujet. Je l'avoue, ce n'est pas forcément dans tes œuvres que les bestioles ci-dessus décrites avec brio sont traduites par « poulet » mais, parfois, dans celles de piliers de la profession.

Sache que la génération qui te précède a ânonné des choses telles que :

Number one is a duck
Number two is a goose
Number three is a bee
Number four is a stork
Number five is a knife
Number six is (holy shit... chais plus.. ah oui, a pig !)
Number seven is a... HEN !!!

(and so on pour cette première leçon d'anglais de 6e dans les années 1970)

Depuis, elle n'en démord pas. Pour elle, tout ce qui n'est pas « hen » n'est pas « poule ». Et comme, un peu plus tard au cours de sa scolarité, on lui a appris que « chicken », c'était du « poulet », eh bien, à cinquante piges, elle persiste dans cette confusion gallinacéenne devenue réflexe automatique, en dépit d'années d'études supérieures, suivies de décennies de pratique au plus haut niveau. Contre toute évidence et quand, au paragraphe ou au plan précédent, elle a elle-même traduit un panier d'œufs, elle te sert des « poulets ».

Voilà un curieux phénomène qui devrait te donner à méditer, non, en ce week-end qui pourrait être de Pâques, sur ce blog négligemment décalé ? Voire te plonger dans le doute et la perplexité, tout autant que ceux qui, depuis des siècles, cherchent la réponse à la question :

« Which came first, the chicken or the egg? »

2013-04-12 ori-cuit-oeuf-1569 (Small).jpg
                                     © Bonareva/Ard'time

17 mars 2013

Naturatiboisée (la suite, et ça ne va pas en s'arrangeant)

Les plus bizarres d'entre les Lecteurs de ce blog se souviendront peut-être d'un libelle pondu ici par une poule d'eau.

Le mode d'expression de la gallinule était contestable, mais pour le fond, elle avait de quoi se faire du souci pour la préservation de son habitat, au moins à moyen terme. Espérons qu'à échéance plus lointaine, les spécialistes de Natura 2000 auront eu raison de raisonner.

Si la poule d'eau logeait toujours dans le coin (non, pas dans le coin-coin, amis farceurs : ce n'est pas un canard !), elle n'aurait aucun mal à le toucher, le fond. Le voici, aux dernières nouvelles de la plus récente expédition :

DSCN6219.JPG

Que ceux qui s'inquiéteraient du sort de la bête à plume acérée se rassurent : je lui ai provisoirement cloué le bec, craignant que, devenue poule de terre, elle n'ait pas pour autant gagné en distinction. Mais elle frétille toujours.