18 septembre 2013
« Le traducteur est un espion...
...à la solde de l’écrivain. »
Joli, non ?
Qui a dit que ledit espion était voué à rester dans l'ombre ? Il est une émission de radio, toujours intéressante quels que soient son sujet et ses participants. Elle cite systématiquement le nom des traducteurs des livres qu'elle présente. Mieux encore : elle les invite souvent, pour eux-mêmes. Cette émission passe le dimanche sur France Culture, elle se télécharge pour qu'on puisse l'écouter quand on veut et rien que pour son titre :
Tire ta langue, elle le mérite.
Dimanche dernier, son animateur Antoine Perraud avait jeté son dévolu sur Bernard Turle, traducteur et écrivain. L'émission m'a fait regretter de n'avoir pas encore lu Diplomat, Actor, Translator, Spy, dont il est co-auteur avec Daniel Gunn, pour découvrir leurs jeux par texte interposé. Ou un autre de ses ouvrages, Le Traducteur-orchestre, ne serait-ce que parce qu'il disait s'être intéressé au traducteur dans son quotidien au lieu de faire œuvre de traductologue (tant mieux, ça nous change des bla-bla fumeux et abscons).
J'en avais lu parler, pourtant, de ses livres ! Ils ne perdent rien pour attendre, la lacune sera vite comblée.
Bernard Turle écrit aussi : « C’est en traduisant que j’ai appris le français. »
Pour mon humble part, je ne cesse de l'apprendre et ce n'est pas fini.
Pas un quart d'heure sans plonger le nez dans le dictionnaire,
avec le sentiment gabinesque de savoir
tout au plus que je ne sais rien.
Ce doit être ça, le quotidien du traducteur.
23:47 Publié dans À travers mots, Ceci n'est (vraiment) pas d'la critique radiophoni | Commentaires (2) | Lien permanent
01 juillet 2012
Mots appris (13) - Weltanschauung
L’autre jour, j’écoutais un ancien numéro d’une de mes émissions-chouchous, Tire ta langue, présentée sur France Culture par Antoine Perraud. Pas récent, le numéro, car il datait du 23 novembre 2004. Ce jour-là, l’émission était intitulée Comment sous-titrer les films ?.
Vers la 37e minute, on entend quelques bribes de dialogue des Ailes du désir. Une vraie musique, et pas seulement à cause de l'accompagnement instrumental. Du miel pour les oreilles, même non germanistes. L’animateur interroge alors Estelle Renard, qui fait partie de ses invités, tous traducteurs audiovisuels :
– Les Ailes du désir nous mènent à cette espèce de langue comme conception du monde… Je crois me souvenir de mes années de lycée qu’il y a un mot allemand pour définir cela, comment dit-on ?…
Estelle répond sans hésiter : « [un truc qui, pour mes oreilles encore emmiellées mais toujours pas germanistes, ressemble vaguement à "Atchoum", mais en plus long.] »
Estelle n’est pour rien au fait que je n’aie pas compris ce mot. Elle l’a fort bien prononcé. Je dois toutefois enquêter auprès de ma Décrasseuse attitrée pour savoir de quoi il s’agit.
Réponse de ma Décrasseuse attitrée : « C'est la Weltanschauung, un concept effectivement bien connu des germanistes et des freudo-jung-iens, entre autres. :-) »
Moi : « … » ←Silence éloquent, vous en conviendrez, indépendamment du fait que notre échange se déroule par mél.
Une brève enquête sur Wiki me permet de combler un peu plus une lacune qui a cependant encore de beaux jours devant elle :
« Weltanschauung est un terme allemand désignant la conception du monde de chacun selon sa sensibilité particulière. Il associe "Welt" (monde) et "Anschauung" (vision, opinion, représentation). La Weltanschauung est au départ une vision du monde d'un point de vue métaphysique, notamment dans l'Allemagne romantique ou moderne. »
Bref, si je replace ma nouvelle acquisition de vocabulaire dans le contexte du sous-titrage, j’en comprends que ça veut dire, dans mon langage à moi : « Sous-titrer, c’est pas fastoche, ça demande un gros boulot d’adaptation culturelle. » Or, souvent, comme l'indique Sylvain Gourgeon, autre participant à l'entretien, on est obligé de rester dans un entre-deux.
Quelqu’un veut-il se dévouer pour broder sur le sujet ce cette vision du monde et de ce qu'elle implique en matière de traduction ? Ici, sous forme d'article que je me ferai un plaisir de publier, ou sur un autre blog, qu’il soit personnel ou associatif ? Ce serait dommage de ne pas approfondir, non ?… La Weltanschauung est dans votre camp ! Danke Schön !
Les producteurs de Tire ta langue ont bien voulu exhumer cet ancien numéro pour l’ATAA (Association des traducteurs-adaptateurs audiovisuels), à l’occasion de l'enregistrement d’une nouvelle émission, diffusée, celle-ci, le 17 juin 2012. Cette fois, plusieurs traductrices membres de l'ATAA étaient invitées à s'exprimer sur L’art du sous-titrage et du doublage. Je ne peux vous donner de lien vers celle de 2004***, mais celle de 2012 est là.
*** Quelques heures plus tard :
Si, en fait, je peux vous le donner, le lien vers l'émission de 2004, comme me le rappellent pertinemment Les Piles dans leur commentaire.
------------
Digression :
Au cours de l'émission de 2004, j'entends avec satisfaction le chroniqueur Philippe Barthelet prononcer correctement (mais après tout, ça devrait aller de soi), le mot « gageure », si souvent écorché par ailleurs à la radio, ce qui m'a récemment inspiré un coup de griffe dans un autre article publié sur ce blog.