08 octobre 2014
Faute d'impression
« Traduire, c'est respirer avec. »
Au point d'étouffer, parfois.
Il vous reste jusqu'à samedi pour découvrir comment et pourquoi, un jour, la traductrice héroïne de Faute d'impression se met à respirer avec, mais d'une autre manière. Car pour elle, l'écriture est alors le seul moyen possible de rendre le souffle à d'autres vies.
Finement interprétée par Laurence Sendrowicz, comédienne et autrice, la pièce se joue à la Manufacture des Abbesses (Paris) jusqu'au 11 octobre, dans une mise en scène de Nafi Salah. Vous n'en ressortirez pas sans impressions.
23:57 Publié dans Ceci n'est (vraiment) pas d'la critique théâtrale | Commentaires (0) | Lien permanent
30 novembre 2012
Esclaves oubliés
Quelque part ailleurs sur ce site, je déplore n’avoir jamais vu annoncer dans les programmes télévisés la diffusion d’un documentaire au sujet tragiquement instructif. Peut-être l’a-t-il été au moins sur France Ô ? Aucune idée. Nulle trace à ce jour dans les bases de données. Je comprends maintenant que cet exemple n’est peut-être ni un hasard ni un cas isolé.
L’autre jour, Sylvia et Daniel, que je remercie, m’ont emmenée au théâtre. Pour une fois, je n’attends pas que la pièce soit terminée pour vous signaler qu’elle est à l’affiche à Paris jusqu'au 15 décembre, au Tarmac :
de Mohammed Aïssaoui
Pièce mise en scène et jouée par Hassane Kassi Kouyaté
Coup de chance, en complément de l’adaptation théâtrale, nous avons eu droit après la représentation à un entretien avec l’auteur du livre dont est tirée la pièce. Pour l'écrire, il a mené une longue enquête, notamment à la Réunion, où se sont déroulés les faits qu'il relate.
Mohammed Aïssaoui
L'Affaire de l'esclave Furcy
Gallimard
Collection Folio
2010
Mohammed Aïssaoui a évoqué pour nous les difficultés rencontrées lors de ses recherches pour retracer l’injustice commise contre Furcy, qui mit des années à faire reconnaître sa qualité d’homme libre par la justice française et en passa une grande partie en prison. Une histoire occultée, personne n’ayant envie de la connaître.
« L’histoire de l’esclavage est une histoire sans archives. », dit l'auteur dans les Cahiers du Tarmac. Les descendants des esclaves ont toutes les peines du monde à établir leur généalogie et pourtant, les actes de vente et de succession ne manquaient pas, où leurs ancêtres étaient consignés tels des meubles. Quand des archives subsistent, leur valeur est méprisée. Comme si on continuait aujourd’hui à refuser une identité aux esclaves oubliés. Retrouver ne serait-ce qu’une date de naissance est un parcours du combattant.
Il semble en être coutumier, des parcours du combattant, Mohammed Aïssaoui, qui s’est attaqué à une autre « quête », selon son propre terme, tout aussi semée d’embûches : tenter de retrouver des cas où, pendant l’Occupation, de membres de la communauté musulmane ont sauvé des Juifs des persécutions nazies. Identifier les rares témoins encore existants, affronter des réticences soucieuses de composer avec la montée en force de l’obscurantisme, avoir l’honnêteté intellectuelle de ne pas fabriquer de légendes, avoir le courage de ne pas tomber dans l’idéalisation.
Mohammed Aïssaoui
L'Étoile jaune et le Croissant
Gallimard
Hors-série littérature
2012
Pas mal, comme programme de sortie et de lectures, hein ?
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Avec un titre pareil, vous pensiez ce billet consacré à la condition du traducteur ? Eh non. Pourtant, des esclaves (façon de parler, évidemment, par rapport à ce qui précède), y compris par « choix », on en trouve... Merci à Caroline, qui m’a communiqué le lien car elle est partageuse et ne voulait pas être seule à se faire du mal.
19 mars 2012
Mots appris (6) - Agelaste
« Agelaste », c’est un mot de Rabelais désignant quelqu’un qui ne sait pas rire.
De Rabelais, j’avais bien retenu « rataconniculer », mais pas « agelaste ». Est-ce « agelaste » ou « agélaste » ? Où se trouve-t-il dans l'œuvre ? Sais pas. Il faudrait que je farfouille. Si un Lecteur peut nous renseigner, merci à lui ! J'espère que ce n'est pas une fausseté de plus en circulation sur le Net, qui attribue tout et n'importe quoi aux grands auteurs, et notamment des citations apocryphes, sans indiquer la source exacte, bien entendu.*
Je viens d’apprendre « agelaste » grâce à de jeunes comédiens qui font des lectures au bistrot du coin. Cette fois, le sujet était casse-gueule : le rire. Il s’en sont très bien sortis, avec le soutien actif de Charlie Chaplin et de Boby Lapointe, entre autres comparses.
Sont chouettes, ces soirées lectures, qui ne coûtent qu'une conso et quelques pièces (ou plus si grande affinité). J’y avais entendu des passages joliment interprétés du magnifique Soie, d’Alessandro Baricco (Gallimard, traduit de l'italien par Françoise Brun). La quatrième saison s'achève bientôt, mais je parie qu'il y en aura une cinquième (et plus si...).
Je sais, Multitudes de Lecteurs, vous êtes disséminés dans l’immensité intergalactique et la Pelouse, c’est pas la porte à côté. Pas d'excuse : un coup de téléportation devrait suffire à vous faire débarquer un lundi soir, là.
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* Digression
C'est ainsi qu'on trouve, dans les livres qu'on traduit, de profondes pensées attribuées à Bouddha, Montaigne ou Gandhi, par exemple. En cherchant, on s'aperçoit qu'elles ont été pondues par un obscur gourou (généralement états-unien et contemporain - dans les cas limite, l'auteur du livre en question lui-même). Mais en exergue, son nom ferait quand même moins chic que celui de Bouddha, Montaigne ou Gandhi.
Un peu plus tard...
Tiens, j'en ai encore croisé deux en moins de 10 minutes. Je sens que j'aurai bientôt une compilation suffisante pour consacrer un billet aux citations faussement attribuées.
17 novembre 2011
Masques et Nez
Masques et Nez, c’est un spectacle, enfin, un cours de théâtre avec des « apprentis » comédiens sur scène, masqués et affublés de gros nez, et leur prof dans la salle. Entre autres exercices, chaque élève présente un poème, un extrait de pièce, une chanson… Là, outre une mémorable et hilarante parodie de Top Gun et un non moins désopilant extrait d'Amphytrion à la sauce clown, grand buvage de petit-lait lors d’un autre passage :
- Le prof : Alors, qu’est-ce que tu nous as préparé, aujourd’hui ?
- L’élève : Une chanson de Celine Dion. Je vais la chanter et en plus, c’est moi qui l’ai traduite.
- Le prof : Ah bon, tu l'as traduite ?
- L’élève : Ben oui, c’est « All by myself ». Mais comme « Tout par moi-même », ça veut rien dire, je l’ai traduite par « Célibataire ».
Et il entonne : « Célibatai-ai-reu », etc.
Ensuite, congratulations du prof et des autres élèves, que les histoires de solitude et d'attente auprès du téléphone ont émus :
- Bravo, c’est bien, tu as tout fait rimer.
- Oui, alors bien sûr, je n’ai pas fait de mot à mot, j’ai ADAPTÉ. Ce qu’il fallait, c’était rendre le sens.
Quand je pense que même dans l’esprit de certains professionnels de la profession (de traducteur), ce n’est pas aussi clair que sur la scène du théâtre Michel (à Paris)... où je vous recommande vivement de courir avant le 25 novembre. Sinon, guettez une reprise du spectacle.
Masques et Nez
Mise en scène : Igor Mendjisky
C’est là. C’est trèèèèès marrant. Et touchant aussi, car chaque élève comédien vient au cours de théâtre avec ses fragilités.
Le spectacle reposant sur l’impro, n’espérez pas, toutefois, avoir droit vous aussi à l’adaptation de All by myself et de Top Gun…