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09 avril 2013

Conseils à un jeune traducteur inexpérimenté (8) - Apprendre à être poli

... voire à un jeune peut-être futur collègue, parce qu'en l'occurrence, il est encore étudiant. Ou plutôt elle, car sauf exception, c'est une fille.

Chère Jeune éventuelle future collègue,

Tu m'écris de temps en temps. Le plus souvent, c'est pour me demander de te prendre comme stagiaire. Loin de t'envoyer balader, comme se targuent de le faire certains collègues d'autant plus oublieux de leurs années d'études qu'elles devraient être fraîches dans leur mémoire, je te réponds toujours, dans un délai de quelques jours au plus. Malheureusement, c'est en général par la négative, faute de pouvoir t'accueillir dans des conditions favorables sous tes multiples avatars.

Parfois, tu as entamé des études de langues alors que, manifestement francophone, tu manies pourtant un langage écrit que j'aurais cru incompatible avec un passage en 2e. Parfois, je me dis, au contraire, que c'est moi qui devrais te solliciter pour venir apprendre le métier auprès de toi, car tes compétences dépassent largement les miennes (soit dit sans ironie – certains jeunes CV sont impressionnants).

Je t'explique que si je pouvais te donner un stage, il serait hors de question, contrairement à ce que tu proposes – comme si ça allait de soi et sans doute parce qu'on t'a mis ça dans le crâne –, que tu fasses mon boulot à ma place : le principe consisterait, pour moi, à te faire travailler sur des textes déjà rendus à mes clients, et ce, avec leur autorisation. Ou bien, à la rigueur, à collaborer sur des travaux en cours, là encore avec leur accord. Parfois, tu me demandes non pas de te prendre comme stagiaire mais de répondre à un questionnaire. Celui-ci donne une idée des lacunes de l'enseignement que tu reçois, d'un point de vue pratique (demander à un travailleur indépendant ce qu'il gagne comme salaire, c'est montrer qu'on t'a jusqu'à présent bercée au pays des Bisounours).

Souvent, je te dresse un bref état des lieux, pour que tu saches où tu mettrais les pieds si je pouvais te recueillir sous mon aile. Jamais je ne t'en veux de te vendre tant bien que mal, puisque le système en général et le corps enseignant en particulier t'y incitent, couteau sous la gorge. Je compatis volontiers, sachant combien il est rude de se préparer à l'entrée sur le marché du travail. Même quand ta fac privée, de préférence, t'a acceptée en licence de lettres alors que tu ne peux aligner trois mots sans commettre deux erreurs de français, je garde patience et t'explique que, pour le succès de ta démarche et de ta carrière tout entière, il serait mieux de te relire et ce, bien que je sache pertinemment que l'orthographe et la grammaire ne seront plus un critère d'aptitude à la profession de traducteur d'ici une petite dizaine d'années.

Un détail, cependant : neuf fois sur dix, tu n'as pas perçu l'intérêt d'adresser des remerciements anticipés pour la réponse que tu attends. As-tu tellement fignolé ton CV et ta lettre que tu as oublié cette formalité secondaire ? Remercier est-il banni de la netiquette des forums que tu fréquentes, au point que tu croies qu'il en va de même dans la vraie vie ? Les gens qui t'ont éduquée t'ont-ils appris que tout t'était dû ? Quoi qu'il en soit, même si je décelais en toi la perle, la stagiaire passionnée, animée d'une vocation exclusive pour ce sacerdoce qu'est notre métier (ouais je sais, j'en rajoute), cette impolitesse serait rédhibitoire. Je te le dis gentiment, d'ailleurs, en fin de courrier, pour qu'une prochaine fois, tu te donnes une chance supplémentaire de le trouver, ton fameux stage.

Merci de ton attention !

Commentaires

"(demander à un travailleur indépendant ce qu'il gagne comme salaire, c'est montrer qu'on t'a jusqu'à présent bercée au pays des Bisounours)."

Ah, toi aussi ça t'étonne toujours ? :-(

"neuf fois sur dix, tu n'as pas perçu l'intérêt d'adresser des remerciements anticipés pour la réponse que tu attends."

Ah, toi aussi ça t'é... euh, tu m'as comprise, hein. Y a du boulot, en somme.

Écrit par : Les piles | 12 avril 2013

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Merci, les Piles !
Tu me rassures, en me donnant à penser que ce billet n'est pas gratuitement grincheux !
Oui, y a du boulot. En amont, très en amont.

Écrit par : L'Autre Jour | 12 avril 2013

Les commentaires sont fermés.