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18 avril 2012

Le traducteur traduit (3) - « En formation »

Rappelons que cette rubrique a pour objet d’étudier le langage parfois abscons mystérieux du traducteur. Le donneur d’ouvrage sera ainsi mieux armé pour détecter les maladroits prétextes avancés par son prestataire pour se livrer à son activité favorite :
la paresse, au risque d’exploser des délais pourtant généreux.

Supposons que vous cherchiez à joindre votre traductrice préférée. (Oui, moi, évidemment. Vous avez de ces questions.) Vous tombez sur ce message d’absence :

« Je suis en formation toute la journée. »

« À d’autres ! Impossible, vous dites-vous : elle est parfaite et ne saurait avoir besoin de se former. La bougresse ment. Se ferait-elle en réalité la totale coiffeur-manucure-esthéticienne ? Très improbable. Vu l’aspect habituellement repoussant de la travailleuse de l’ombre, ce ne doit pas être dans ses mœurs. De plus, la journée et ses maigres ressources financières n’y suffiraient pas. Sans doute court-elle une de ces expos dont elle est friande, profitant d’un des rares avantages de son statut indépendant et dans l’illusion d’y être plus tranquille, à l’heure où déferlent retraités et groupes scolaires. »

Eh bien non. Elle ne ment pas (et elle va aux expos en nocturne). Deux traductions possibles à ce que vous prenez pour du boniment :

1. Interprétation de l’à la fois très estimée et inestimable Rose-Marie V. :

Votre traductrice joue les nuages. En effet, il n’y a à peu près qu’eux qui puissent être « en formation ». (Je passe sur d’autres phénomènes atmosphériques moins bien qualifiés pour une métaphore flatteuse, du genre tornades et autres catastrophes naturelles, dont je ne sais comment ils ont pu traverser l’esprit de Rose-Marie.) Hypothèse qui me remplit de gouttelettes d’aise, car nuage, c’est mon déguisement préféré.

2. Réalité justifiant plus probablement le message d’absence :

Nonobstant sa perfection naturelle, votre traductrice préférée approfondit ses connaissances auprès de collègues ou de formateurs spécialisés. Elle apprend à :

  • maîtriser encore mieux les ressources multiples d’Internet et ses infinies possibilités de communication
  • tenir sa comptabilité dans les règles de l’art (meilleur moyen, selon elle, d’y passer le moins de temps possible, et donc d'en consacrer davantage à ses chers donneurs d'ouvrage)
  • décrypter dans toutes ses finesses le subtil langage juridique qui fait le charme d’un contrat de traduction.
  • etc.

En cela, elle met à profit ses droits. En tant que traductrice pragmatique, ils lui sont déjà acquis depuis longtemps, puisque les professionnels libéraux cotisent pour cela. Et elle suit également les formations de son association de gestion. En tant que traductrice exerçant sous le statut d’auteur, ces droits lui sont théoriquement ouverts depuis 1946, comme à tous les travailleurs. Dans la pratique, ce ne sera effectif qu’à partir du 1er juillet 2012, date à laquelle les auteurs cotiseront eux aussi au titre de la formation continue. En attendant, ils bénéficient de sessions expérimentales, prises en charge par certains conseils régionaux.

Alors, il se pourrait que votre traductrice préférée
se re-transforme momentanément en nuage,
de temps en temps (couvert, donc).

nuage.jpeg

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