30 septembre 2015
Le traducteur est-il humain ?
Hier soir, France 2 diffusait un beau documentaire à fort contenu humain.
Même le générique citait chaque intervenant, y compris les musiciens ayant participé à la bande sonore. En outre, il remerciait nommément les personnes qui, au sein de diverses organisations (institutions officielles, partenaires commerciaux, etc.), avaient contribué à l'existence du film. Des remerciements collectifs étaient adressés à tous les participants. C'est bien simple, ce générique durait 4 minutes, selon ce que j'ai pu revoir sur Pluzz. Bref, personne n'était oublié.
Personne ? J'ai quand même été étonnée qu'au générique de la version sous-titrée, seules trois traductrices vers le français soient citées. Dans celui de la version en voice-over (superposition de voix françaises à celles des intervenants, sans synchronisation comme en doublage stricto sensu), les comédiens étaient bien là, mais pour l'adaptation ne figurait que le nom de la personne qui l'a supervisée.
Pourtant, nous avions vu s'exprimer au cours du film des personnes de tous pays, y compris locutrices de langues dites rares. Très rares même, pour certaines, en tout cas au regard du nombre minime de francophones aptes à les traduire. Et ces langues rares étaient nombreuses, comme on n'en a jamais vu autant, réunies dans un même film.
Il y aurait donc un hic quelque part, voire plusieurs ? Ce film se serait adapté tout seul ? Et trois multiglottes seraient parvenues à elles seules à rendre dans les sous-titres français toutes les nuances de... euh... j'avoue que j'ignore quelles sont les langues en question, car elles ne sont mentionnées nulle part, même si je devine qu'il y a parmi elles de l'hébreu, du hindi, des langues africaines, etc. Pour sûr, il y a au moins un hic, allez savoir à quel stade de la chaîne. L'adaptatrice qui a chapeauté la traduction pourrait peut-être nous le dire.
Quant aux interprètes, professionnels ou non, qui se trouvaient forcément aux côtés des personnes interviewées et de l'équipe de tournage (multiglotte aussi, pour comprendre tous ses interlocuteurs ?), et sans qui ce film n'aurait pu voir le jour, ils n'apparaissent nulle part non plus.
J'offre un abonnement gratuit à ce blog à qui me dira où Yann Arthus-Bertrand
a tourné les images de toute beauté qui précédent immédiatement le générique, vers 2h08. Pardon pour cette capture d'image de mauvaise qualité.
Ajout le 1/10 :
Important : dans le billet ci-dessus, j'évoquais le fait qu'une personne avait coordonné l'adaptation du film et qu'elle avait peut-être des éléments d'explication à nous donner. Elle m'a écrit en privé et je l'en remercie. Elle me précise qu'elle n'est pour rien dans l'absence de certains noms de traducteurs de langues dites rares au générique des versions sous-titrée et en voice-over diffusées à la télévision. Rien ne le laissait croire dans mon article, dans lequel j'écrivais justement qu'on ignorait où se situait la cause de ce manque d'information quant à une partie des traducteurs impliqués dans le projet. Le but n'était d'ailleurs pas d'incriminer tel ou tel maillon de la chaîne. Si cette collègue se sent offensée, j'en suis navrée et je lui en ai exprimé le regret. Mon texte n'a pour objectif, évidemment, que d'attirer l'attention, comme le font par ailleurs les associations/syndicats dont nombre de traducteurs sont membres, sur le fait qu'on oublie trop souvent de citer nos noms, alors que nous sommes auteurs et avons le droit à la même considération que les autres intervenants figurant à un générique de film.
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Autre publication ce même jour sur ce blog,
qui met les bouchées doubles pour la Saint-Traducteur.
09:14 Publié dans Ceci n'est (vraiment) pas d'la critique télé, Je traduis, tu traduis... | Commentaires (10) | Lien permanent
04 décembre 2014
La 81e des 101 Choses
L'été dernier, je m'aventurais à traduire ici une page du livre 101 Things a Translator Needs to Know.
J'en faisais la présentation suivante :
Le WLF Think Tank est une bande de traducteurs + une illustratrice qui ont regroupé, dans un livre intitulé 101 Things a Translator Needs to Know, 101 conseils principalement destinés aux inconscients aventuriers novices qui voudraient se lancer dans la traduction.
J'ai récidivé, toujours avec l'autorisation des auteurs et cette fois sur l'article 81, consacré au sous-titrage. Voici l'original, suivi de ma version. Puisque nous sommes entre nous, j'agrémente celle-ci de quelques NdT (que j'évite en situation réelle et que vous pouvez toujours essayer d'inclure dans un sous-titre...), pour vous expliquer mes partis pris. Car comme souvent et pas seulement dans l'audiovisuel, traduire a consisté à adapter.
Squeezing information
into so little space is a
big challenge for subtitl
Ever tried fitting a ten-letter answer into six squares in a crossword grid? Then you'll understand that subtitlers need to work magic. Every few seconds they turn dozens of words of dialogue into just a few characters in two succinct lines of text. It's hard work, of course, and far more time-consuming than standard translation: capturing the essence of what is said in all its idiomatic and cultural nuances in coherent, semantically self-contained texts that are left on screen for just the right length of time.
Subtitling is not for the faint-hearted — nor for fearless dilettantes. If you are interested in it, contact your professional association to ask for advice. Maybe you'll find a mentor willing to share the secrets of their wizardry.
Texte de l'illustration :
Enseigne :
UK SUBTITLING CO
Parties d'enseigne au sol :
NITED INGDOM MPANY
Caser un maximum d'infos en un rien
de place, c'est l'exploit du sous-tit
(1)
Vous avez déjà essayé de faire entrer un mot de dix lettres dans six cases de mots-croisés ? Si oui, vous comprendrez que le sous-titrage, c’est de l’exploit. Plan par plan, il faut transformer comme par magie des répliques entières en quelques caractères(2), sur deux lignes. Cette adaptation prend bien plus de temps qu’une traduction courante car après avoir saisi toutes les nuances idiomatiques et culturelles du dialogue, on doit en restituer l’essence. Et ce, en une unité de sens complète et sur une durée limitée à la fraction de seconde près.
Des vocations dans la salle ? Poules mouillées et têtes brûlées s’abstenir. Les candidats au sacerdoce(3) se renseigneront auprès d’associations professionnelles telles que l'ATAA(4). Et(5) peut-être trouveront-ils un sorcier disposé à leur transmettre ses secrets.
Texte de l'illustration :
Enseigne :
ST FEBREF CO
Parties d'enseigne au sol :
OUS- ITRAGE RP.
(1) J'ai disposé le titre sur deux lignes comme dans un sous-titre, plutôt que sur trois lignes comme dans le livre.
(6) Les piles intermédiaires, que je remercie de leur avis toujours précieux, trouvent qu'on aurait pu ne pas traduire l'enseigne. À vous de voir ! J'ai fait comme si un illustrateur avait dû incorporer les textes dans l'image telle quelle, c'est pourquoi j'ai conservé l'enseigne en trois parties.
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Et maintenant, à vos plumes électroniques,
si vous voulez commenter ou améliorer la proposition de traduction ci-dessus !
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Cher grand Cousin Blog de l'ATAA,
Voilà des mois, je t'ai proposé cette traduction en vue de billet. Tu en as bien voulu et tu t'es même dit prêt à rédiger une intro. Je t'ai remis la traduction au tout début septembre. Trois mois plus tard, toujours rien, alors qu'il est arrivé que tu restes muet et ne publies rien pendant six semaines dans l'intervalle. Tu m'as pourtant bien confirmé, à plusieurs reprises, que la parution ne saurait tarder...
Bref, si tu veux maintenant reproduire cet article pour en faire profiter ton audience, autrement plus vaste que la mienne, n'hésite pas.
Mais pour moi, la moindre correction vis-à-vis des auteurs du livre était de ne pas laisser traîner cette parution au point qu'un nouvel opus vienne remplacer 101 Things au box-office ! Je n'allais donc pas laisser mon travail aux oubliettes indéfiniment.
16:48 Publié dans À travers mots | Commentaires (0) | Lien permanent
14 mai 2012
Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? (7) Un couiz !!
Un couiz sur le site de l'ATAA, avec un topo de présentation
sur son blog !
Allez-y, jouez, c'est instructif !
Je vous aide : une piste vers la réponse à une des questions se trouve sur L'Autre Jour.
Vous aurez accès aux soluces après avoir cliqué sur Submit. (<- Ça, c'est pour ceux qui, comme moi, risqueraient de les réclamer à l'ATAA au lieu de lire l'intro comme il faut - Ici : smiley contrit.)
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À propos d'une des questions du couiz :
Selon moi, quelqu'un qui traduit un texte, c'est un traducteur. Il n'adapte pas plus en doublage ou en sous-titrage qu'en quelque autre domaine de la traduction, y compris en technique – et même plutôt moins, à mon avis.
Car traduire, c'est adapter, par définition. Le domaine où il me semble qu'on adapte le moins, c'est la traduction littéraire, puisqu'on essaie de restituer autant que possible non seulement le sens et le niveau de langue, mais aussi la musique (le rythme, les sonorités...) du texte d'origine.
Ça tombe bien, je voulais justement écrire un billet au sujet de cette histoire d'« adaptateur », qui me paraît relever avant tout d'un certain snobisme. Les collègues sont conviés à confirmer - ou pas - sous forme de commentaires !
Pour moi, un adaptateur (dit « SM », en l'occurrence), c'est une personne qui adapte une oeuvre ou un programme audiovisuel du français au français (par exemple), de manière à la sous-titrer pour les sourds et malentendants. Souvent, il s'agit à l'origine d'un traducteur, qui est venu par la suite à cette autre activité.
Le seul autre adaptateur que je connaisse, c'est une sorte de raccord. Un genre de traducteur pour qu'une prise électrique britannique et un rasoir français se comprennent, par exemple :)
11:20 Publié dans Je traduis, tu traduis... | Commentaires (0) | Lien permanent