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21 juin 2014

Terme appris (32) - Chasse devers

Pas très loin de Paris, à côté d'un célèbre château, vous pénétrez dans une vaste salle haute de plafond et aux murs légèrement asymétriques. Au centre : un filet. Deux joueurs armés de raquettes et de curieuses balles terminent leur partie. Voyant la curiosité sur vos bobines, ils viennent vous expliquer avec une patience héroïque les règles de cet art, dont vous ne savez rien d'autre que le nom, historiquement très connoté.

Si l'un de vous arrive à suivre leurs explications, l'autre tombe manifestement de la planète No Sports.

— « Chasse de vair » v-a-i-r ? Ou « chasse verre » v-e-r-r-e, comme dans Cendrillon ?, demande l'extraterrestre qui, les antennes toujours à l'affût de nouvelles expressions terriennes, vient de relever celle-ci dans le discours de son interlocuteur, plein de sollicitude et d'enthousiasme à décrire sa passion.

— Non, « chasse devers ».

S'ensuivent de nouvelles explications, dont l'alien de service ne retiendra qu'une chose (enfin, elle espère ne pas l'avoir retenue de dev... euh, de travers), qui marque fortement son esprit : dans ce jeu des rois, empreint de symbolique politique, la chasse devers fait figure d'abus de pouvoir.

La visiteuse de l'espace est ravie de trouver un sens fort et profond dans les règles d'une discipline sportive. Cette découverte lui confirme que la compétition, ce n'est pas toujours que des types en short et en sueur courant après une balle ou des points. (En témoigne aussi, dans un autre domaine sportif, bien plus sous les feux de l'actualité en ce moment, cet autre très fort symbole : le jeune Brésilien paraplégique qui a pu se lever de son fauteuil pour tirer dans un ballon, l'autre jour lors de l'inauguration da copa du mundo, grâce à son exosquelette à base de neurosciences et de robotique.)

Vous avez envie d'en savoir plus, d'admirer le spectacle et, peut-être, si la partie est finie, de vous faire décrire, spécimen disséqué à l'appui, l'anatomie de la curieuse balle, qui ressemble à celle de tennis mais rebondit beaucoup, beaucoup moins ?

Rendez-vous ! Vous rencontrerez de très sympathiques passionnés qui prendront le temps de vous initier (un grand mot, en ce qui me concerne) à leur pratique et vous convieront même à les rejoindre, car ils aimeraient rassembler plus d'adhérents.

En effet, le jeu en question n'est plus réservé aux rois depuis longtemps, comme en témoigne cette plaque sur une modeste placette de village :

2014-05-29 Jeu de Paume DSCN7142_2135 (Small).JPG

Les joueurs de paume de Fontainebleau ont même une page propre à délecter tout traducteur, puisqu'elle regroupe des
mots et expressions de la langue française issus de leur occupation favorite !

Voilà qui me procure une transition rêvée pour vous annoncer la prochaine Matinale organisée par la délégation Ile-de-France de la SFT, dont je vous copie-colle le communiqué, intitulé Les Matinales entrent sur le terrain :

Tennis, football, cyclisme… l’été sera riche en évènements sportifs. Loin d’être sur la touche, les traducteurs sportifs s’entraînent déjà pour être à l’avant-poste. À mi-chemin entre journalisme et traduction, ces spécialistes du sport savent s’approprier un domaine au style et aux codes particuliers. Si l’esprit d’équipe est de mise sur le terrain, il l’est aussi parmi les traducteurs qui collaborent sur de grands évènements. Mais au fait, qui sont leurs clients ? Comment les traducteurs sportifs travaillent-ils ? Quels sont les avantages et les inconvénients de ce domaine ? Laurent Laget et Hervé Couvert, traducteurs sportifs indépendants, nous donneront leur vision de leur métier. Sur la base d’exemples concrets, nous verrons ce qui fait de la traduction sportive une véritable spécialisation.

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Quand ?
Samedi 28 juin à 10 h 01, et nous vous accueillerons dès 9 h 30.

Où ?
Au Café du Pont-Neuf
14, quai du Louvre - 75001 Paris
M° Pont-Neuf/RER Châtelet

Votre petit-déjeuner comprendra une boisson chaude, un verre de jus d’orange et une viennoiserie.
Un reçu de 9,50 € vous sera remis sur place.

La farofa sur la feijoada

Inscrivez-vous auprès de la delegation.idf-matinales@sft.fr d’ici le vendredi 23 mai à 12 h.

Nous pourrons mieux organiser la manifestation et vous remporterez peut-être notre livre du mois.
 

V’là mon travail, v’là mon dico
Une traduction à présenter ? Un outil papier préféré ? Apportez-les ! Une table leur sera réservée.

Adhérents ou pas à la SFT, traducteurs et interprètes en exercice ou étudiants, venez !

Au plaisir de vous retrouver ou rencontrer,
Votre équipe des Matinales-IDF

 

Les prochaines formations en Île-de-France :
Réussir son installation et se constituer une clientèle (14 juin 2014)

Écriture, traduction, réécriture : les après-midi stylistiques de la SFT (08 au 22 juillet 2014)

Et toutes les prochaines manifestations en Île-de-France : 
http://sft.fr/delegation-iledefrance.html

 

 

19 décembre 2012

Je traduis, tu traduis, ils traduisent ? (14) Mots voyous

 

 

Ce que vous voyez ci-dessus, c’est une diapo que Maria Marques nous a montrée lors de la dernière Matinale organisée par la délégation Île-de-France de la SFT. Merci, Maria ! Cette séance visait à donner aux traducteurs, notamment les expatriés, des astuces pour garder le lien avec leur langue et leur culture sources.

Pour cela, l'un des moyens trouvés par trois de nos collègues brésiliens, Maria déjà nommée, Evaldo et Cido, consiste à se retrouver une fois par mois afin de discuter, dans leur langue, des questions que leur pose la nôtre. (On est d’accord, à ce stade, ce n’est plus de la conscience professionnelle et de la passion pour notre belle culture, c’est du masochisme.)

La diapo regroupe des exemples de termes, expressions et autres curiosités linguistiques qui donnent particulièrement du fil à retordre à nos trois collègues. Et aussi aux autres traducteurs non francophones car, quand Maria a affiché cette liste, on a entendu un cri du cœur collectif dans la salle, accompagné d’un vague frémissement de compassion chez les autochtones.

Mettons sur la sellette la bande de malfaisants ou du moins de suspects incriminés. On y ajoutera « sillage », dans le contexte parfumeur, qui n’est pas le copain de Cido.

  Dites donc, vous, mots et expressions voyous, c’est pas des manières d’embêter les collègues étrangers. Z’avez pas honte ?

  Hon hon, on n’a rien fait, M’dame. Juré craché, on est innocents. Vous l’avez dit vous-même, on est des mots et des expressions. On n’y peut rien, à ce qu’on fait de nous.

– Admettons. Il est vrai que vous êtes de simples outils. Il suffit de voir votre niveau d'expression quand vous êtes livrés à vous-mêmes, comme maintenant...

Pour ma part, lorsque j’ai affaire à vos homologues anglais ou espagnols, je dégaine la théorie du sens : je pige le texte et le contexte, je passe par une phase d’abstraction où ils n’ont plus la moindre existence puis, réexprimant cette idée, j’atterris dans ma propre langue, où je pioche dans le vocabulaire à ma disposition pour cueillir les plus appropriés de vos congénères. Bref, je ne passe pas directement d’un mot de langue B ou C à un mot en langue A. Sinon, je pondrais de la bouillie pour chats et on m’aurait déjà remplacée depuis longtemps par un ordinateur. (Comment ça, ça se fait déjà ?) Maintenant que je vous ai éclairés sur votre propre mode d’emploi, expliquez-moi pourquoi vous êtes tout de même une plaie pour Maria, Evaldo et Cido.

  Hem. C’est que, pas toujours mais souvent, on nous enrobe dans des sauces qui ne veulent rien dire, justement.

– Je reconnais que la diapo montrée ensuite par Maria, et que j’épargne aux lecteurs de ce blog, était un bel exemple de charabia marketo-communicationnel, avec l’un d’entre vous, le mot « filière », pour instrument principal. Assurément, traduire quelque chose qui ne veut rien dire, c’est ce qu’il y a de plus difficile dans notre boulot. J’en ai croisé aussi, des présentations PowerPoint et des discours de députés européens vides de toute substance. (Autre explication tout à fait envisageable : c’est moi qui suis bouchée. Trop profond pour moi, leur sens m'échappait.) Allez, ça passe pour cette fois, bande de mots et expressions. Circulez ! Mais que je ne vous y reprenne pas à vous pavaner sur les diapos de Maria, hein ?

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Vous connaissez vous aussi une bande de mots qui traînent dans vos textes source et vous causent de régulières sueurs froides ? N’hésitez pas, dénoncez-les ici. Je prendrai leur défense…

Parmi les spécimens présents sur la diapo, on décernera le pompon au dilemme vouvoiement/tutoiement, avec de piteuses excuses, au nom de la communauté francophone, à toute la planète traduisante (hors composante maso), pour lui offrir une aussi inépuisable source de perplexité et d’arrachage de cheveux. Ça ne résoudra pas son problème, mais moi, je serais pour qu’on inverse l’usage du « tu » et du « vous », car je trouve que ce dernier, d'une sonorité bien plus belle à mon goût, mériterait d’être réservé aux êtres les plus proches et les plus aimés.


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Lisez ci-après le commentaire de Caroline, qui a réussi à composer un joli texte avec les mots de la diapo !