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21 décembre 2015

Conseils à un Jeune Traducteur Inexpérimenté (16) - Merci la BNF

Cher Jeune Traducteur Inexpérimenté,

Tu as déjà fait quelques pas dans l'édition ? Et même traduit plusieurs livres ? Mazette.

Désespérant de voir tes éditeurs reproduire ton nom sur leur catalogue, comme la réglementation les y oblige, tu aimerais pourtant frimer r'un peu pouvoir faire état de tes brillants services. Quelques clics suffisent pour retrouver tous les ouvrages que tu as traduits, avec ISBN et tous autres détails bibliographiques ! Et découvrir au passage que tes donneurs d'ouvrage en ont réédité certains. Connaissant ta modestie, ils se sont gardés de te faire rougir en t'apprenant le succès auquel tu as humblement contribué.

Va savoir, peut-être même es-tu en quelque sorte fiché dans cette caverne d'Ali Baba documentaire.

Encore plus fort : on attribue par erreur la traduction d'un livre alors que tu n'as fait que traduire des mises à jour, lors d'une réédition ? On oublie d'indiquer que tel livre, refusant de se traduire tout seul, a requis les efforts de deux traductrices ? Dès que tu l'en informes ou du moins à la prochaine mise à jour de son site, la BNF (Bibliothèque nationale de France), car c'est d'elle qu'il s'agit, rectifie, sauf quand c'est l'éditeur qui s'est planté en imprimant un nom à la place d'un autre et persiste dans l'erreur malgré tes signalements répétés.

Toujours plus fort... Acquérant avec la bouteille une certaine connaissance de la nature humaine, tu anticipes la distraction de tes donneurs d'ouvrage et préfères guetter la sortie des bouquins que tu as traduits, plutôt que d'attendre qu'ils t'en préviennent, par exemple en t'envoyant les exemplaires prévus au contrat. Qu'à cela ne tienne. Un tour sur la page Nouveautés Éditeurs assouvira ton impatience (ou pas, si les projets réalisés dans l'urgence il y a des mois en vue d'une parution en fin d'année ne sont toujours pas sortis des presses). D'un naturel jaloux Bon camarade, tu t'empresseras ensuite de découvrir, avant de les repérer sur les rayonnages des librairies, les titres dont la version française est signée de tes copains-collègues.

S'ajoutent à tout cela toutes les ressources d'intérêt moins traductégocentrique qu'offre la BNF, évidemment.

Coi de gratitude admirative, tu es ?

Merci la BNF.

 

30 septembre 2015

Le traducteur est-il humain ?

Hier soir, France 2 diffusait un beau documentaire à fort contenu humain.

Même le générique citait chaque intervenant, y compris les musiciens ayant participé à la bande sonore. En outre, il remerciait nommément les personnes qui, au sein de diverses organisations (institutions officielles, partenaires commerciaux, etc.), avaient contribué à l'existence du film. Des remerciements collectifs étaient adressés à tous les participants. C'est bien simple, ce générique durait 4 minutes, selon ce que j'ai pu revoir sur Pluzz. Bref, personne n'était oublié.

Personne ? J'ai quand même été étonnée qu'au générique de la version sous-titrée, seules trois traductrices vers le français soient citées. Dans celui de la version en voice-over (superposition de voix françaises à celles des intervenants, sans synchronisation comme en doublage stricto sensu), les comédiens étaient bien là, mais pour l'adaptation ne figurait que le nom de la personne qui l'a supervisée.

Pourtant, nous avions vu s'exprimer au cours du film des personnes de tous pays, y compris locutrices de langues dites rares. Très rares même, pour certaines, en tout cas au regard du nombre minime de francophones aptes à les traduire. Et ces langues rares étaient nombreuses, comme on n'en a jamais vu autant, réunies dans un même film.

Il y aurait donc un hic quelque part, voire plusieurs ? Ce film se serait adapté tout seul ? Et trois multiglottes seraient parvenues à elles seules à rendre dans les sous-titres français toutes les nuances de... euh... j'avoue que j'ignore quelles sont les langues en question, car elles ne sont mentionnées nulle part, même si je devine qu'il y a parmi elles de l'hébreu, du hindi, des langues africaines, etc. Pour sûr, il y a au moins un hic, allez savoir à quel stade de la chaîne. L'adaptatrice qui a chapeauté la traduction pourrait peut-être nous le dire.

Quant aux interprètes, professionnels ou non, qui se trouvaient forcément aux côtés des personnes interviewées et de l'équipe de tournage (multiglotte aussi, pour comprendre tous ses interlocuteurs ?), et sans qui ce film n'aurait pu voir le jour, ils n'apparaissent nulle part non plus.

 

 

J'offre un abonnement gratuit à ce blog à qui me dira où Yann Arthus-Bertrand
a tourné les images de toute beauté qui précédent immédiatement le générique, vers 2h08. Pardon pour cette capture d'image de mauvaise qualité.

 

Ajout le 1/10 :

Important : dans le billet ci-dessus, j'évoquais le fait qu'une personne avait coordonné l'adaptation du film et qu'elle avait peut-être des éléments d'explication à nous donner. Elle m'a écrit en privé et je l'en remercie. Elle me précise qu'elle n'est pour rien dans l'absence de certains noms de traducteurs de langues dites rares au générique des versions sous-titrée et en voice-over diffusées à la télévision. Rien ne le laissait croire dans mon article, dans lequel j'écrivais justement qu'on ignorait où se situait la cause de ce manque d'information quant à une partie des traducteurs impliqués dans le projet. Le but n'était d'ailleurs pas d'incriminer tel ou tel maillon de la chaîne. Si cette collègue se sent offensée, j'en suis navrée et je lui en ai exprimé le regret. Mon texte n'a pour objectif, évidemment, que d'attirer l'attention, comme le font par ailleurs les associations/syndicats dont nombre de traducteurs sont membres, sur le fait qu'on oublie trop souvent de citer nos noms, alors que nous sommes auteurs et avons le droit à la même considération que les autres intervenants figurant à un générique de film.

 

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Autre publication
ce même jour sur ce blog,
qui met les bouchées doubles pour la Saint-Traducteur.

Jérôme, c'est ta fête !

— Traducteur, même indépendant, tu as un patron.
— Allons bon.
— Saint, de surcroît.
— C'est entre autres parce que je n'en connaissais pas, de patrons saints, que je suis devenu indépendant.
— Et comme souvent parmi nos congénères, flanqué d'un animal de compagnie du genre félin.
— Ah ouais, j'ai le même, en un peu plus petit, aussi griffu et généralement vautré non pas par terre mais sur le bouquin.

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Saint patron des traducteurs et son lion fidèle découvrant, dépités,
qu'on leur a encore confié un texte truffé d'ambiguïtés, redites, contradictions
et que ce n'est pas avec ce qu'on les paie qu'ils retapisseront la grotte
et mettront du beurre dans les croquettes.

 

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Autre publication
à lire sur ce blog,
en cette Journée mondiale de la traduction.

29 septembre 2015

Petits lus (2) — Nuances

« Google Translate is free, of course, but it doesn’t always have the nuances necessary for correct translation », lit-on dans le Guardian.

 

Vérifions :

 

« Google Translate est libre, bien sûr, mais il n'a pas toujours les nuances nécessaires pour la traduction correcte »

 

En punition pour votre mauvais esprit, Lecteurs dont je vois d'ici le sourire sardonique, vous méditerez sur la nuance entre gratuité et liberté. Vous avez trois heures.

 

 

The Guardian
Don't rely on Google - invest in languages to grow your business
par Lucie Jolin, 29 septembre 2015
Merci à Iris Heres, collègue de la SFT,
qui nous a communiqué le lien vers l'article.

27 août 2015

Mots appris (33) — Mot à moche

Bien obligée de l'apprendre : il m'est venu tout seul, il s'est imposé à moi. Je le rencontre trop souvent pour mon goût. C'est le « mot à moche ».

L'aval d'un collègue et ami m'a encouragée à le partager avec vous. Faut-il lui souhaiter une belle carrière (au mot à moche, pas à JL, déjà pourvu) ?

 

Les distingués linguistes parmi nous établiront peut-être un rapport entre
le mot à moche et la Mochlangue.

20 août 2015

Conseils à un Jeune Traducteur Inexpérimenté (14) - Études et chiffres en tout genre

Résumé pour lecteur pressé et pas regardant sur l'exactitude :
le traducteur-auteur, qui est à la fois un libéral déclarant ses revenus en BNC et un salarié (à 64 % de son effectif), représente avec ses 1 070 congénères 41 % des professionnels indépendants de l'édition et obtient, dans le cas minoritaire où il est de sexe masculin, des tarifs de 35 % supérieurs à ceux de ses consœurs.

 

Cher Petit Ami explorant l'univers des chiffres, ces signes curieux ornant le haut de ton clavier, Cher Jeune Collègue désireux de mieux connaître et de mieux faire connaître ta noble profession, statistiques à l'appui, Cher Jeune Camarade Littéraire affichant un mépris certain pour les chiffres sauf sous forme de droits d'auteur, Cher Jeune Traducteur Inexpérimenté,

Tu as eu la joie de découvrir récemment que nos institutions publiques s'intéressaient à toi. Ou plus précisément, qu'elles étudiaient ton métier si méconnu, parmi d'autres, et publiaient le résultat de leurs investigations. C'est méritoire. Enfin, des faits et même des chiffres ! Voilà qui devrait dissiper certaines idées reçues.

Épluchons les 156 pages de la première de ces études, consacrée par l'Insee à l'emploi et aux revenus des indépendants. Ô joie ! Page 60, elle réserve un encadré aux professions du secteur culturel. Ce doit être nous, ça ! Toi, tu traduis sous le statut d'auteur des livres et des documentaires, à côté d'autres commandes relevant, elles, de la traduction libérale. Moi aussi. (J'ai bien cherché, c'est notre seul point commun. Pour le reste : âge, sexe, expérience, langage, goûts musicaux et gastronomiques, choix vestimentaires... un gouffre nous sépare.)

Le texte de présentation de l'encadré indique, entre autres catégories professionnelles : « communication (audiovisuel et multimédia, presse, publicité, traduction) ». Ça se confirme, nous sommes sous le microscope des chercheurs.

C'est d'autant plus réjouissant que, nous dit-on, la nomenclature utilisée par l'Insee est harmonisée avec celle de l'Union européenne, ce qui permet des comparaisons. Voilà qui est sensé et donne bon espoir d'informations et d'actions utiles, y compris au niveau communautaire. Par acquit de conscience et pure maniaquerie, vérifions notre code NAF dans le tableau, à la rubrique « Édition écrite » : « Traduction et interprétation, code 7430Z ».

Je le connais, celui-là. C'est celui qui figure sur mes papiers Urssaf, puisque j'ai la casquette libérale, en plus de celle d'auteur. Autrement dit, c'est celui qui s'applique à mes traductions hors édition et hors audiovisuel mais en aucun cas à mes traductions pour l'édition ou pour l'audiovisuel. Il apparaît aussi sur les papiers Urssaf de nos collègues relevant uniquement du statut libéral, y compris ceux qui œuvrent exclusivement dans des domaines techniques et informatiques, ou financiers. Loin de moi l'idée de nier le caractère culturel au sens large de ces activités, et le caractère culturel discutable de certains livres ou films – le sens du terme « culturel » restant à préciser. Mais dans ce cas, tout ingénieur, informaticien ou banquier travaille dans le secteur culturel et le rapport Insee devrait faire beaucoup plus que 156 pages.

Le code NAF 7430Z s'inscrit dans la catégorie « Activités spécialisées, scientifiques et techniques » définie par l'Insee, aux côtés de ceux de services juridiques, comptables ou vétérinaires.

« Et les traducteurs-auteurs, ils ont un code NAF spécial ? », soulèves-tu la question, cher Jeune Traducteur Inexpérimenté mais intelligent, quoique non encore nomenclaturé en tant qu'auteur. Il est vrai que si tu demandais une inscription sous les deux codes, il y aurait à craindre que l'Urssaf s'embrouille, voire explose. Eh oui, il en existe un, le 352b, pour les « auteurs littéraires, scénaristes et dialoguistes ». Il inclut nommément les traducteurs littéraires. C'est à croire que l'Insee, à laquelle on doit cette étude, ne lit pas sa propre nomenclature. Pourtant, on peut penser que cette catégorie de traducteurs s'inscrit davantage parmi les professionnels de la culture que ceux relevant du code 7430Z.

Résultat : dès ce premier encadré, on subodore que le rapport se plante de population. Dans la colonne de droite du tableau sont énoncés les pourcentages représentés par les diverses professions au sein de leur catégorie. Soit, pour la traduction, 41 % de l'édition écrite. L'ennui étant que parmi cette catégorie, désignée sous le code 7430Z, seule une minorité de traducteurs travaille pour l'édition. Et que les traducteurs qui travaillent pour l'édition ne sont pas comptabilisés, puisque leur code NAF 352b ne figure nulle part dans l'étude. Il est vrai que la plupart d'entre eux n'ayant pas fait de déclaration d'installation (pour cette même raison que l'Urssaf risquerait de s'embrouiller et de les classifier parmi les libéraux et surtout, parce qu'ils sont dans le cas le plus habituel dispensés de cette inscription), ils ne sont répertoriés sous aucun code.

Bref, ce pourcentage est faux, d'emblée. Examinons tout de même la suite. Un encadré n° 2 se penche sur les « indépendants des secteurs culturels dans les sources statistiques » (page 62). À force de se pencher, il nous aperçoit, et nous distingue très bien, même. Mais comme il se fonde sur le mode de déclaration de revenus auprès des services fiscaux, il ne retient que les auteurs déclarant leurs droits d'auteur en BNC (Bénéfices non commerciaux). Or parmi les traducteurs-auteurs, ceux-ci sont minoritaires, la plupart d'entre nous déclarant leurs droits d'auteurs en Traitements et salaires ! Et l'encadré d'avouer, pas plus piteusement que ça, qu'il « évalue ainsi à plus de 30 000 le nombre d'artistes-auteurs absents de la base "non-salariés" ».

Par chance, un encadré n° 3, bien informé et intitulé « Une sous-population d'indépendants dans les milieux culturels : les artistes auteurs affiliés », vient à notre rescousse pour extraire du néant statistique la « sous-population des artistes-auteurs [traducteurs d'édition compris] "les mieux intégrés" ». C'est-à-dire ceux qui gagnent assez (8 577 euros en 2014) pour être non pas simples assujettis, mais affiliés à l'Agessa, l'organisme qui, faisant le lien entre nous et le régime général de la Sécurité sociale, encaisse nos cotisations.

Enfin, un chiffre qui nous concerne, même s'il ignore les malheureux assujettis, définitivement inintégrables ? désintégrés ? perdus dans les limbes ! 1 810 euros mensuels (il s'agit d'un montant net ?) en moyenne comme revenu pour un traducteur affilié à l'Agessa, notre profession occupant le bas de l'échelle parmi les auteurs. Et les traducteurs-auteurs affiliés ne seraient que 1 070 en 2011. Allez atteindre avec ça 41 % des effectifs des professionnels de l'édition ! L'Insee s'avère incapable de détecter ses propres absurdités contradictions : la page 63 de son rapport donne clairement à penser que les chiffres de la page 60 ne tiennent pas la route.

On apprend aussi dans cet encadré, sans plus de précisions, que les traducteurs affiliés à l'Agessa sont en majorité des traductrices. Ouf, enfin une info qui reflète la réalité.

 

Tu commences à avoir des doutes, cher Jeune Traducteur Inexpérimenté, sur l'intérêt d'études ne reposant que sur des chiffres – par nature, puisqu'elles émanent de l'Institut national de la statistique* ? Et qui, par-dessus le marché, trouvent moyen de les établir sur des bases erronées ? Tâchons de te consoler et d'en apprendre un peu plus en inspectant une deuxième étude, celle-là publiée par le ministère de la Culture. Elle s'intitule « Revenus d'activité et niveau de vie des professionnels de la culture ». Nous voici de nouveau en plein dans la cible. Chouette. Et c'est notre ministère de tutelle qui se soucie de notre sort ! Chouette derechef.

« Bon, alors, combien on gagne ? », trépignes-tu. Pour satisfaire ton impatience, sautons directement à la page 5, où il est dit que les traducteurs gagnent, comme revenus directement liés à leur activité, entre 22 500 et 26 500 euros (nets, selon la page 25).

Remontons pages 3-4. Vlatipa que nous sommes des cumulards ! « Plus de 10 % des professionnels des arts visuels et des auteurs littéraires et traducteurs cumulent salaires et revenus d'indépendants. » 

Un peu plus loin, la situation entre deux chaises particulière aux auteurs se précise et le pourcentage s'élève : chez «  les auteurs littéraires et traducteurs (13 %), [le cumul] correspond alors vraisemblablement à une combinaison de droits d’auteur (lorsqu’ils sont déclarés en bénéfices non commerciaux) et de salaires (rémunérant par exemple une activité d’enseignement ou une prestation scénique pour un artiste des spectacles). »

Là encore, on ne prend en compte, pour établir des généralités, que le cas particulier d'une minorité qui, parmi les traducteurs exerçant sous statut d'auteur, déclare ses droits en BNC !! Et si l'on s'en tient à cette logique, la majorité des autres, celle qui déclare ses droits d'auteur en Traitements et salaires, est tout simplement considérée comme SALARIÉE, puisque cette nouvelle étude se fonde, pour examiner nos professions, non pas sur les réalités de notre exercice, mais sur le mode d'imposition de nos revenus.

Figure ensuite un tableau récapitulant la part salariée et non salariée des professionnels de la culture. Moralité et si on lit vite, nous, traducteurs d'édition, sommes à 64 % SALARIÉS. Vous en connaissez beaucoup, vous, des traducteurs d'édition salariés ?? Moi, aucun. Je connais juste une poignée de collègues salariés de l'audiovisuel. Selon ce même tableau, 34 % auraient des revenus non salariés. Cela défie l'évidence. Ne serait-ce que parce que la population prise en compte est uniquement celle déclarant ses droits d'auteur en BNC, voilà encore un chiffre qui peut partir à la poubelle. Avec nos impôts qui ont servi à financer ce second torchon.

Au fait, l'autrice de cette deuxième étude est la même que celle de la partie consacrée par le rapport de l'Insee aux non-salariés dans les activités culturelles.

Madame, je voudrais vraiment communiquer avec vous à propos de ces documents. Je vais tâcher d'entrer en contact avec vous. Si un lecteur a vos coordonnées, je souhaiterais vivement en prendre connaissance, merci.

Tu pleures à chaudes larmes, pauvre Petit Traducteur qui vient de découvrir que même un chiffre peut être faux et que l'on peut élaborer à son sujet des tissus d'informations erronées ?

 

Pour te faire oublier ta déconvenue, jetons-nous sur une revue professionnelle des plus sérieuses, consacrée à l'actualité littéraire, comme son nom l'indique. « Hommes et femmes dans l'édition, la parité avance à petits pas »... Chien de garde comme je te connais, parions que l'article ainsi intitulé va te passionner, d'autant plus qu'il repose sur un rapport publié par les estimés artistes-auteurs plasticiens du CAAP (ouais, ceux-là même qui prétendent nier auprès du Conseil d'État le statut d'auteur des traducteurs et donc leur droit à la formation, au risque de se priver bêtement de leur contribution à l'enveloppe).

Qu'est-ce qu'il nous révèle, l'article ? « En France, parmi les salariés, les hommes gagnent en moyenne 25 % de plus que les femmes, une inégalité deux fois plus forte chez les artistes-auteurs, puisqu'ils gagnent en moyenne 50 % de plus. » Plus précisément, nous indique un tableau, les traducteurs d'édition gagnent 35 % de plus que leurs homologues féminines.

Explication de texte : ce rapport compare salariés et travailleurs indépendants. Dans le monde salarié, on observe évidemment des différences à travail égal. Pour ce qui est des professionnels indépendants, l'étude du ministère nous balance les rémunérations annuelles respectives des auteurs et des autrices, sans chercher à préciser si cela représente un volume de travail identique. Il est très probable que pour des raisons sociologiques, les femmes qui travaillent en indépendantes pour l'édition  écrivent/traduisent de moindres volumes annuels. Il se peut aussi qu'elles soient payées moins au feuillet. (Chère ATLF, voudrais-tu bien, s'il te plaît, exploiter ce point du questionnaire que tu soumets à tes adhérents chaque année et qui, seul, peut nous éclairer sur la question ?)

Mais qui peut faire croire à un lecteur, même distrait et parcourant cet article d'un œil trop pressé, que ta rémunération au feuillet, cher Jeune Traducteur Inexpérimenté, dépasse de 35 % la mienne ? Nous sommes d'accord, un leitmotiv revient en filigrane tout au long de ce billet : il y a comme un hic.

Que cela ne te dissuade pas, (relativement) plein aux as comme tu l'es si l'on en croit la presse, de m'offrir un pot au troquet du coin. Et de te servir plus que jamais de ton cerveau quand tu traduis des textes contenant des données chiffrées, ne serait-ce que pour signaler au donneur d'ouvrage qu'elles ne tiennent pas debout.

 

 

* Quand je cherche des études sérieuses
fondées sur des chiffres,
je les trouve souvent auprès de l'INED,
Institut national d'études démographiques.
Je me repais de ses fiches claires et instructives,
qui battent en brèche bien des idées toutes faites.
Dommage qu'il ne soit pas dans les attributions
de l'INED
d'examiner la population des traducteurs et sa démographie.