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25 février 2014

Bourdes de poils

Pour beaucoup d'entre nous, traducteurs ou pas, l'un des petits plaisirs sadiques de l'existence consiste à repérer des bourdes dans des traductions, non ? Avouez-le... Encore faut-il qu'on ne soit l'auteur ni de la traduction, ni de la bourde. Le pire étant de relever une bourde dont on n'est pas l'auteur dans une traduction dont on est l'auteur, tout ça parce qu'une tierce personne est venue y laisser sa sale patte.

Non, je ne tomberai pas dans la victimisation et la complaisance en dénonçant les saloupiots qui s'évertuent à saboter notre noble travail. D'abord, je l'ai sans doute déjà fait. Et puis, le phénomène étant assez fréquent, il faudrait un long travail de compilation. Ce billet en deviendrait bien trop fatigant à composer.

J'ai plutôt décidé d'en avouer une, de bourde. Non, pas par goût soudain de l'autoflagellation. Bien trop fatigant aussi, et douloureux, en plus.

Je passe aux aveux tout d'abord parce que c'est l'occasion de saluer les correcteurs. Si certains imposteurs méritent pis que pendre (être condamnés à relire leurs idioties ad vitam æternam, par exemple), d'autres, en passant derrière nous, font un beau travail d'élagage de redondances, de binage de barbarismes, d'arrachage de fautes d'accord, de recomposition de constructions boiteuses... de vrais jardiniers ! Ce blog en aurait bien besoin. Et leurs corrections m'apprennent chaque fois que je ne sais rien, ce que je trouve plutôt réconfortant car le contraire sentirait le sap... la fin de parcours. Je citerai le nom de trois d'entre eux, avec lesquels j'ai eu la chance de réaliser un fructueux travail d'équipe :  Catherine Tranchant, Laetitia Lanzaro et Matthieu Girard.

Amis Éditeurs, continuez à les faire travailler, eux et leurs bons collègues. Et surtout, à nous mettre en rapport ensemble pour que nous puissions vous rendre un travail de qualité. Ce sera toujours mieux que de les laisser dans l'ombre sans que nous puissions communiquer avec eux, voire de faire bâcler par n'importe qui la relecture en introduisant des fôtes là où il n'y en avait pas et de zapper l'étape de la vérification des épreuves, pour peu que vous ayez entrepris d'économiser des coûts.

« Bon alors, tu nous la sors, ta bourde ? » La voilà. S'il n'y avait pas eu Laetitia ci-dessus nommée pour réparer les effets de ma distraction, eh bien... j'aurais, malgré mes quatre ou cinq autorelectures habituelles, laissé mon erreur sans y percevoir la moindre contradiction et elle aurait peut-être été publiée, dans ce passage :

« Dar Hosta, auteure*** et illustratrice de livres pour enfants, dessine des séries d’oiseaux grincheux. "Moi qui suis diplômée en art de l’idiotie, j’ai la manie des tachimaux. Curieusement, tous mes pâtés se transformaient en oiseaux. Non pas de ces mignonnes boules de poils qui bâtissent des nids, mais des sales piafs qui n’arrêtent pas de râler. C’est comme cela que ma série Cranky Birds est née. On pourrait croire que je suis du genre grincheux aussi. Mais ce n’est pas moi. C’est juste les oiseaux." »

Vous ne remarquez rien ? C'est que vous êtes aussi distraits que moi et qu'une carrière de correcteur vous est manifestement fermée (autre explication : vous vivez exclusivement entourés de peluches). Dans le cas contraire, vous aurez rectifié : eh oui, un piaf, c'est une boule de plumes. Pas une boule de poils.

Il est vrai que dans ce très fantaisiste livre de Carla Sonheim (Hi, Carla!), Dessiner et peindre des animaux imaginaires - Drôles de zèbres et autres créatures sans queue ni tête (j'aurais aimé trouver le sous-titre mais le mérite en revient à l'éditrice), les bestioles nées d'une tache sur un trottoir ou d'une fissure sur un mur – alias tachimaux – n'ont que faire de l'académisme. Mais quand même...

En plus de célébrer le travail des correcteurs, ce billet vise bien entendu à vous inciter, vous aussi, Lecteurs qui n'avez jamais osé les confesser, à dévoiler dans les Commentaires vos propres inavouables bourdes ! En plus, nul ne pourra vérifier que, sous couvert d'anonymat, vous n'« avouez » pas celles des collègues. Mais ce ne serait pas joli-joli.

C'est à vous ! Qui dit pire ?

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Couverture Dessiner des animaux imaginaires

Carla Sonheim
Dessiner et peindre des animaux imaginaires
Drôles de zèbres et autres créatures sans queue ni tête
Eyrolles, 2013

Un joli guide pratique pour apprendre le dessin et la peinture (jetez un coup d'œil sur le sommaire et les extraits en pdf). Dans lequel – ce qui n'est pas toujours le cas de ce type d'ouvrages parfois interchangeables et illustrés d'œuvres tellement moches qu'elles vous donnent envie de vous adonner au karaté ou au tricot plutôt qu'au dessin –, à côté de conseils judicieux, pédagogiques et somme toute fondés sur une solide technique, l'écriture reflète vraiment une originalité et un tempérament d'artiste, le tout enrobé d'humour.

Comme ce qui précède le prouve, je me sentirais assez la fibre appropriée pour traduire le nouvel opus de Carla, The Art of Silliness, moi...

 

*** J'aime mieux « autrice », comme on le verra j'espère dans un prochain billet.
Mais bon. Reste à le faire admettre par les éditeurs et correcteurs
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Non, non, je ne rebaptiserai pas ce billet « À poil, les bourdes ! ».

En revanche, je vous aiguille volontiers vers ce communiqué du Conseil permanent des écrivains, Les auteurs, bientôt tous à poil ?